conciliaires, un abri de fortune. Simple expédient, qui ne pouvait retarder l’échéance de la soumission ou de la révolte. Pour lui, déjà décidé à la lutte, il était condamné à avancer toujours, retenu par ses souvenirs ou ses scrupules, poussé par la fougue de sa nature, l’envoûtement de ses idées, les maladresses de ses ennemis, les concours successifs qu’il trouve, comme la foi dans le message qu’il apporte. Ainsi de ses doctrines fidéistes, devait-il être entraîné à appliquer aux institutions ecclésiastiques les conséquences. Presque séparé du catholicisme et voulant y demeurer, quel moyen, sinon d’en étendre les limites ? Et proclamant la réalité de la plus grande Église, celle de l’esprit et de la foi, à laquelle il se flatte d’appartenir, comment ne serait-il point conduit à refuser à l’autre, extérieure et légale, cette institution divine qui l’a fondée et qui la perpétue ?
Le lien doit être rompu qui unit l’Église à l’Évangile. Et successivement, d’étape en étape, rejetant toutes les formes d’autorité qu’on lui oppose, en appelant du Légat au Pape, du Pape au Concile, du Concile au peuple chrétien, et finalement à l’inspiration intérieure, Luther va-t-il abattre tous les pouvoirs ecclésiastiques. Plus de primauté. A Augsbourg, Luther avait déjà opposé l’Écriture aux décrétales, critiquant les abus, maintenant l’institution. En 1519, dans sa treizième proposition sur la puissance du Pape (juin) et ses Résolutions (septembre), c’est l’origine même du pouvoir papal qu’il conteste. Royauté sans titre. Pas de promesse faite à Pierre : les textes allégués sont torturés ou faux. Rome n’a pas plus de droits que Constantinople à la direction des âmes. La primauté n’est qu’une création de l’histoire. Et le temps n’est pas loin où le Pape déchu de son pouvoir sera proclamé partout comme le fils de Bélial et l’Antéchrist. — Plus de pouvoir conciliaire. A Leipzig (juillet 1519), Luther pouvait admettre encore l’infaillibilité du Concile dans les seules définitions de la foi. Passagère réserve, qui ne tarde point à disparaître ! Les Conciles se sont contredits : les Conciles peuvent donc errer. Anathème sur Constance qui a condamné les propositions chrétiennes de Huss. « Dans cette session au moins, l’assemblée n’a été qu’un conciliabule de Satan. » — Et enfin, il s’agit bien de pape et de concile ! Plus de hiérarchie. Si la plénitude du sacerdoce est d’absoudre, tous ses membres sont égaux. « Le pape ne saurait être supérieur à l’évêque, l’évêque au prêtre. » Finalement, si les sacremens ne sont que des signes,