le jeune maître et les grands érudits de l’humanisme chrétien, le contact est étroit. De 1511 à 1516, Luther a compulsé déjà les commentaires de Lorenzo Valla sur l’Évangile, et il est au courant des travaux de Pic de la Mirandole. Dès 1509, il a Reuchlin entre les mains ; il se servira des Rudimenta hebraïca comme aussi du lexique d’Alexandre. Il a surtout, devant lui, les travaux de Lefèvre. Il annote son Psalterium Quintuplex, qu’il suit dans le détail de ses corrections. Il lui emprunte le principe de sa méthode, opposant à l’exégèse historique et littérale de Nicolas de Lyre, une interprétation spirituelle et mystique qui fait des Psaumes le récit de la vie et de la Passion du Christ. Peut-être est-ce aussi à l’exemple de Lefèvre que, en 1515, Luther sera entraîné vers saint Paul ? Leur pensée suit une marche semblable. Enfin l’influence du Nouveau Testament d’Érasme, paru en 1516, est visible dans la seconde partie du Commentaire de l’Épître aux Romains. C’est dans ces grandes éditions critiques que Luther a trouvé les matériaux solides de sa théologie.
N’est-ce que cela ? L’humanisme chrétien n’aspirait point seulement à une renaissance érudite. C’était une révolution théologique qu’il préparait.
La diffusion de la Bible, dont les éditions se multiplient, celles surtout des Psaumes et de saint Paul, prépare les esprits à un changement. Une théologie nouvelle, plus simple, plus claire, affranchie de la barbarie des mots, du fatras des questions ; une religion, plus vivante et plus libre, moins entravée de pratiques, d’observances, de règlemens : voilà ce que les consciences les plus hautes réclament. Le génie d’Érasme, la querelle de Reuchlin ont donné une voix puissante à ces griefs. Cette voix, comment Luther ne l’eût-il point entendue ? Il est facile de démêler, dans ses premiers écrits ou ses sermons, l’influence exercée sur lui par les maitres de la pensée nouvelle. Avec eux et par eux, il entre alors dans le courant de réaction qui se manifeste par toute l’Europe contre les abus des observances, du culte et de l’autorité. On peut noter, dès 1512, dans un de ses sermons, ces idées réformatrices. Il y réclame déjà une prédication épurée de l’Évangile : moins de pratiques, de pèlerinages, de dévotions, de religion « corporelle ; » plus de sentiment chrétien, « Celui-là seul est sauvé qui croit ; celui-là seul croit qui écoute la Parole de vérité ; celui-là seul écoute la