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japonais. La plus connue d’entre celles-ci est la « Mida Raigô, » la « venue du Bouddha sur la terre, » (Kokka, n° 233) d’un temple du Kôyasan où Amida et 25 Bosatsu descendent du ciel sur des nuages pour aller chercher l’âme d’un saint prêtre vivant retiré dans les montagnes. L’art de Yamatoye s’y trouve annoncé par la composition soucieuse de l’effet pittoresque et par la façon de traiter le paysage. Les rochers du premier plan supportant de beaux arbres en fleurs ont la forme tourmentée de ceux des Ye-makimonos postérieurs et se souviennent de certaines œuvres Tang. Se fondant sur ces remarques, on a parfois discuté l’attribution de la peinture à Eshin, lui assignant plutôt pour date le XIIe siècle. Ce que l’on ne peut nier en tous les cas, c’est qu’elle fut directement inspirée par la doctrine de l’évêque du Hiei-san.

La même observation s’applique au triptyque du Kinkai Kômyôji de Kyôtô (Kokka, n° 224) portant le nom de « Yamagoshi no Mida, » « passage de la montagne par Mida » et qui aurait été exécuté durant l’ère Shôriaku (990-994). Les trois divinités : Amida et ses acolytes, apparaissent à mi-corps sortant radieusement d’une chaîne de montagnes, telles que, — suivant la tradition, — elles apparurent en rêve à Eshin sur le Hiei-san. Il est fait dans leurs images un très habile emploi des applications de filets d’or dites Kirikane. Les montagnes émergeant des nuages et couvertes de verdure ont des contours renforcés en bleu comme dans les Senzui Byobû, du XIIe siècle. Deux paravens latéraux représentent des scènes du Paradis et du Purgatoire.

Un fait vient s’ajouter à tous les précédens pour montrer comment la peinture laïque japonaise sortit peu à peu de l’art bouddhique : Motomitsu, fondateur de la très yamatisante école des Kasuga, fut d’abord l’élève de Kose Kimmochi, le petit-fils du grand Kanaoka et commença par exécuter des Butsuzô (images bouddhiques), telles que l’Avalokitésvara du Tôji à Kyôtô. D’origine illustre, — il appartenait à la branche Kanin des Fujiwara, — il reçut différens titres honorifiques, tels que ceux de Takumi no kami (chef du bureau des Constructions) et d’Echizen no mori (gouverneur de la province d’Echizen.) Il créa une technique nouvelle consistant à tenir le pinceau obliquement par rapport à la soie ou au papier. Vers le Nengô Kwankô (1004-1011), ses œuvres étaient fort goûtées, ce qui explique sa nomination d’Edokoro-no Azukari (chef du bureau de peinture,