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préciables avantages de la position de Nossi-Bé et sur la nécessité de s’installer aussi à Mayotte pour en écarter les Anglais. L’occupation des petites iles n’était toutefois qu’un acheminement. C’est à Madagascar même qu’il fallait aller, à Diégo-Suarez bien entendu, mais non pas seulement là : la France devait faire valoir ses droits sur toute la grande ile et substituer sa domination à celle des Hovas. Ceux-ci ayant exaspéré une bonne partie des populations, le moment se trouvait favorable. Il fallait recruter parmi les Sakalaves, dont nous avions fait déjà nos protégés, les élémens d’une petite armée. Dans un délai de cinq ans, dix mille hommes bien entraînés seraient disponibles : renforcés par un bataillon d’infanterie de marine, un bataillon de volontaires de Bourbon et un demi-bataillon d’artillerie de montagne, ils suffiraient pour marcher sur Tananarive. L’itinéraire, enfin, était déjà indiqué, et c’était précisément celui qui devait être suivi un demi-siècle plus tard : on partirait, disait l’amiral, de la baie de Bombetoke, c’est-à-dire, en fait, de Majunga. Un pareil projet était l’aboutissement logique de toute la politique de M. de Hell pendant son gouvernement de Bourbon ; il s’accordait, en outre, à merveille avec les visées ambitieuses de la Direction des Colonies ; il semble bien, enfin, qu’il séduisit aussi le ministre de la Marine du moment, l’amiral Duperré. Celui-ci résolut donc de le soumettre à ses collègues, et ceux-ci furent appelés à en délibérer dans les premiers jours de 1843, très vraisemblablement le samedi 7 janvier.

Mais cette délibération ne se limita point à l’objet particulier qui la provoquait et les résolutions qui la terminèrent eurent un caractère assez général. Ce Conseil des ministres de janvier 1843 établit en effet un lien entre les entreprises poursuivies sur la cote d’Afrique, dans l’océan Pacifique ou dans l’océan Indien, et c’est alors que se précisa le dessein de systématiser notre expansion.

II


En ce temps déjà lointain, les bâtimens à voiles, plus nombreux que nos navires actuels, naviguaient plus constamment et, la fièvre des partages n’ayant pas encore sévi, on rencontrait sur tout le globe maints territoires réputés sans maîtres. Aussi ne se passait-il guère d’année sans que des rapports d’officiers