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ratifs furent contremandés et l’ordre donné d’évacuer Sainte-Marie. Cet ordre ne fut toutefois pas exécuté, car les ministres se heurtèrent à la ténacité des bureaux. La Direction des Colonies, que l’on invitait depuis dix ans à préparer une installation à Madagascar, ne pouvait voir dans la chute d’un régime un motif suffisant pour changer une habitude maintenant prise, et cela d’autant moins que le port jugé nécessaire dans l’océan Indien continuerait à nous manquer après comme avant. Elle fit donc maintenir l’occupation « provisoire » de Sainte-Marie. Elle était décidée à ne l’abandonner que si elle trouvait, dans la région, un établissement plus avantageux, et, conservant, d’autre part, ses projets d’extension, guettait l’occasion de les remettre au jour.

Cette occasion ne tarda pas. Dès le début de 1832, le ministre de la Marine se trouva conduit à déclarer à la Chambre, dans la discussion du budget, que la France défendrait ses droits sur Madagascar. Il ne souleva nulle protestation. Profitant aussitôt du fait, la Direction des Colonies adressa au gouverneur de Bourbon des instructions spéciales : il importait, lui disait-on, de ne pas laisser s’éteindre nos droits positifs ; ordre était en outre donné d’explorer, en vue d’un établissement éventuel, une certaine baie sur laquelle des rapports nautiques avaient donné quelques renseignemens intéressans : et c’est là l’origine de notre installation à Diégo-Suarez qui devait finir par se réaliser grâce à l’inlassable obstination des services coloniaux, mais seulement cinquante-trois ans plus tard.

Aussitôt, en effet, que l’idée prit officiellement corps, des oppositions surgirent. L’exploration prescrite avait fourni des indications telles que le gouverneur de Bourbon fit immédiatement étudier les fortifications à élever par la suite sur la baie, puis adressa à Paris un plan détaillé d’occupation. Mais ce plan dut être soumis au Conseil d’amirauté. Celui-ci émit un avis si nettement défavorable que, tout en refusant les argumens invoqués, la Direction des Colonies ne put que s’incliner. Supposer toutefois qu’elle se tint pour battue serait mal connaitre ses habitudes d’alors : dix-huit mois ne s’étaient pas écoulés qu’elle trouvait un moyen de revenir à la charge. Un certain M. Garrot, capitaine au long cours, qui passait pour jouir d’un certain crédit à Madagascar, avait été alors chargé d’examiner officieusement la possibilité de conclure avec les Hovas un traité de