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ou tout au moins quelques atermoiemens, touchant l’utilisation des traités.

Non pas que le gouvernement se désintéressât maintenant de ces régions. Son désir persistant d’y stimuler le commerce s’affirmait par des ordonnances modifiant les tarifs douaniers en faveur de leurs produits. De même, il était entendu, et dès la fin de 1839, que les territoires obtenus par Bouët-Willaumez serviraient à fonder des établissemens. Seulement, la décision de principe ainsi prise, deux ans s’écoulèrent sans nulle mesure d’exécution. Songeant à l’exemple de la Cazamance, on aurait souhaité l’intervention d’associations commerciales, et celles-ci étaient évidemment difficiles à organiser, puisqu’elles finirent par ne se pas constituer. Les graves préoccupations diplomatiques de l’année 1840 durent aussi détourner momentanément l’attention ; peut-être enfin, la prudence traditionnelle de notre administration lui fit-elle désirer trop d’études et d’informations complémentaires. Cette dernière excuse, que le ministère de la Marine invoqua lui-même un jour, est une des plus vraisemblables, car l’exploration de la côte se poursuivait sans interruption. Bouët-Willaumez, devenu commandant de la station navale d’Afrique, continuait de s’en occuper, et, en 1842, il signait six traités nouveaux nous assurant encore des parcelles territoriales, notamment à Grand-Bassam et au Gabon.

Tous ces traités ne pouvaient naturellement demeurer secrets, ni toutes ces explorations rester inaperçues. Les Anglais commencèrent donc à s’en préoccuper, et une enquête parlementaire qu’ils ordonnèrent alors parut témoigner chez eux du désir de nous devancer. Comme ils venaient précisément d’y parvenir dans une région du globe dont nous allons parler dans un instant, la direction des Colonies s’émut et parvint à brusquer les choses. Les mesures arrêtées vers le mois de novembre 1842, une ordonnance du 29 décembre ouvrit les crédits nécessaires et, en janvier 1843, les ordres étaient expédiés au Sénégal pour procéder à l’installation de postes militaires à Garroway, à Assinie et sur la rive du Gabon. Sur la côte de Guinée donc comme en Cazamance, la France, tout en réservant les droits qu’elle tenait de ses divers traités, se bornait à l’occupation d’une partie des parcelles qu’elle s’était fait céder. Comme en Cazamance, aussi, il s’agissait d’établissemens modestes : quelques magasins protégés par des blockhaus, pareils à ceux utilisés en Algérie, semblaient