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avec l’art copte. La rénovation religieuse de l’Islam marqua enfin pour cette conception artistique l’heure du triomphe définitif. Le développement des arts musulmans n’est que le terme de l’évolution séculaire qui éloignait de plus en plus les Orientaux du naturalisme. La meilleure preuve que la nouvelle formule décorative était parfaitement adaptée à leur tempérament, c’est que, depuis ces époques lointaines, ils ne l’ont pour ainsi dire jamais abandonnée et qu’aujourd’hui encore c’est elle qui inspire les productions abâtardies de leurs arts industriels.

Ce fut cette expansion dans le monde de l’« orientalisme » artistique qui condamna la statuaire à une mort irrémissible. Il ne faut pas croire en effet que l’accroissement de la barbarie suffise à expliquer cette disparition. Si le secret du modelage s’est perdu, c’est parce que le goût était ailleurs. Les artistes les plus habiles ne songeaient plus à se perfectionner dans une discipline qui n’excitait plus que l’indifférence, et c’est dans d’autres techniques qu’ils s’appliquaient à déployer toutes les ressources de leur invention. A défaut de la statuaire en effet, la sculpture n’en a pas moins continué à subsister, profondément modifiée, il est vrai, par la destination qu’on lui donnait désormais et par les procédés nouveaux introduits dans sa technique. On assiste au moyen âge à ce développement paradoxal d’écoles de sculpture redevables de leurs procédés à des techniques aussi éloignées que possible des arts plastiques, telles que l’orfèvrerie ou la tapisserie. Le modelage est alors réduit à sa plus simple expression et il finit même par être éliminé tout à fait.

L’histoire de la sculpture byzantine est à cet égard des plus instructives et l’on peut suivre de siècle en siècle sa transformation suivant les formules de l’Orient. Au moment où Constantin fonde sur le Bosphore sa Nouvelle Rome, l’art des grandes villes hellénistiques règne encore, mais fortement imprégné déjà d’ornemens orientaux. La statuaire, religieuse ou officielle, concourt à la décoration de la nouvelle capitale, mais déjà de nouveaux procédés de sculpture apparaissent : les fonds d’ornemens sur lesquels se détachent les statues des sarcophages dits d’Asie Mineure sont obtenus à l’aide du trépan, instrument qui perce la pierre au lieu de la modeler comme le ciseau. Aux masses largement traitées et destinées à se grouper en un profil d’ensemble se substituent des surfaces surchargées de détails qui, cernés en quelque sorte par