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la faire venir à Ratisbonne si la Diète se prolonge. Puis passant, pour lui dire adieu, au tutoiement et à la tendre familiarité à laquelle sa correspondante était habituée : « Adieu, chère Madelon, écrit-il, montre-toi aussi vaillante à mettre au monde ton enfant que Thérèse à enfanter ses dents, je la baise bien fort, la petite donzelle avec son polisson de frère, et mille fois la dame Ninon, de qui je suis parfaitement le très affectionné mari. »

Les relations conjugales du vicomte de Pompadour et de Marie Fabri ne paraissent pas avoir été très différentes de celles qui unissaient Antoine Brun et Madeleine d’Accosta. Le ton de leur correspondance révèle chez tous deux une tendresse très vive et très familière, une impatience très grande de se revoir quand ils sont séparés ; chez Marie Fabri, un dévouement actif aux intérêts communs, le vif désir d’éviter au vicomte des soucis d’argent, de le voir satisfaire sans scrupule ses fantaisies. Leur union avait associé un grand seigneur imprévoyant et prodigue coin me il y en avait beaucoup en ce temps-là et la fille d’un trésorier de l’extraordinaire des guerres, qui de ses origines tenait le goût de l’ordre. Tallemant représente Mme de Pompadour comme se compromettant jusqu’au scandale avec des subalternes de sa maison et des gens du dehors. Nous n’avons rien découvert qui justifie l’imputation du célèbre anecdotier et M. Clement-Simon qui a eu sous les yeux « les volumineuses correspondances, les papiers de famille » des Pompadour, n’y a rien trouvé non plus de nature à l’accréditer. Le seul document relatif à la conduite de Marie Fabri est une lettre de Pompadour à sa femme au sujet d’une missive galante à elle adressée. Cette lettre pourrait tout au plus la rendre suspecte d’un peu de coquetterie et les termes dans lesquels elle est conçue ne permettent pas, bien au contraire, de voir dans Pompadour un mari complaisant.

Si ce n’est pas par l’abandon que se distinguaient les intérieurs protestans, c’était par une gravité, voire une austérité qui laissaient apparaître et comme jaillir à l’occasion une affection profonde. Tel fut, par exemple, le caractère de celui de Du Plessis-Mornay et de Charlotte Arbaleste, de celui du maréchal de La Force. Ce dernier mérite de nous arrêter quelques instans. On connaît le maréchal de La Force. Soldat heureux, n’ayant compté à la guerre que des succès, popularisé par sa bonhomie par ses longs états, de services prolongés