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V. — DERNIERS JOURS DU BLOCUS. — NÉGOCIATIONS FINALES. — REDDITION DE LA PLACE ET DE L’ARMÉE DE METZ

17 octobre. — Journée sans incidens militaires.

Le colonel Boyer rentre de sa mission infructueuse à Versailles, nous n’avons plus rien à espérer d’une armée de secours quelconque ! Les Allemands, sachant à quoi s’en tenir sur ce que nous pouvons avoir encore de vivres, édifiés sur l’état physique de nos soldats, peuvent patienter aisément, convaincus qu’il nous faudra sous peu nous résoudre à accepter les conditions qu’il leur plaira de nous imposer.

21 octobre. — Par une sorte d’accord instinctif et tacite, les avant-postes cessent complètement de tirer les uns sur les autres. Les soldats allemands en arrivent, par humanité, à offrir de quoi manger aux nôtres qui leur font face !

C’est notre agonie que respecte notre ennemi lui-même !

23 octobre. — On arrive à pouvoir encore distribuer dans notre division 25 grammes de blé par homme.

25 octobre. — Distribution de 30 grammes de riz et de 25 grammes d’orge et de seigle par homme.

Nous apprenons le résultat d’une nouvelle mission du colonel Boyer, envoyé auprès de l’impératrice Eugénie en Angleterre.

L’Impératrice a déclaré qu’elle ne pouvait que souhaiter et désirer ardemment le salut de notre armée, mais qu’elle ne pouvait intervenir, pas plus cette fois-ci qu’à l’époque où avaient commencé les négociations Régnier !

Il fut alors décidé, dans un conseil de guerre, que le général Changarnier, dont personne n’avait à suspecter la grande loyauté, se rendrait auprès du prince Frédéric-Charles pour entamer des négociations !

Le général de Cissey est appelé ensuite d’urgence, à 5 heures du soir, au grand quartier général du Ban Saint-Martin. Il y trouve le maréchal Bazaine en conférence avec le général Changarnier. Le maréchal lui fait savoir qu’il doit se rendre au château de Frascaty, le soir même et sans retard.

Le général Changarnier expose alors lui-même qu’il s’est déjà, rendu le matin chez le prince Frédéric-Charles. Le prince, après l’avoir reçu avec de grands honneurs militaires et l’avoir