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l’irritation et les souffrances endurées, commence à se manifester chez certains !

Des menées, plus ou moins secrètes, sont ourdies en vue de faire remplacer le maréchal Bazaine comme commandant en chef, par le général de Ladmirault, qui prendrait alors le général de Cissey comme chef de l’état-major général de l’armée. Le général de Ladmirault, en présence du maréchal Bazaine, flétrit comme il convient ces fâcheuses tendances à l’indiscipline, toujours condamnables, fussent-elles motivées par une irritabilité assez naturelle, qui résultait de nos épreuves et de nos infortunes accumulées !

L’abandon du sentiment du devoir, manifesté par un certain nombre, eut malheureusement et par surcroît une triste répercussion, car notre ennemi l’apprit tout de suite, grâce à son habile service d’espionnage ; il fut édifié sur notre situation militaire intérieure et encouragé à nous serrer toujours de plus près.

2 octobre. — Les Allemands, à 1 heure et demie du soir, canonnent nos avant-postes extrêmes placés à Sainte-Ruffine ; ils paraissent disposés à agir de vive force contre nous. L’artillerie de nos forts répond avec ses grosses pièces à celles de l’ennemi et éteint leurs feux vers 2 heures et demie. Notre adversaire renonce à prononcer son attaque décisive et nos forts continuent à tirer sur Ars-sur-Moselle et sur Frascaty où ont lieu des mouvemens de troupes allemandes.

A 4 heures du soir, l’alerte étant passée, nos troupes reprennent leurs conditions de vie habituelles. La ration de tourteaux de colza donnée à nos chevaux est remplacée par un équivalent de betteraves ; les pauvres bêtes font plus que jamais pitié ! Quelques chevaux d’officiers, seuls, sont encore capables de faire du service en étant très ménagés.

3 octobre. — L’ennemi, exaspéré de n’avoir pu nous déloger de nos avant-postes de Saiute-Ruffine, qu’il n’avait pas voulu la veille attaquer à l’arme blanche, nous canonne à nouveau avec une grande intensité de feux. Il n’a pas plus de succès que le 2 octobre ; nos troupes, remarquablement aguerries et très alertes, le tiennent en respect de façon absolue. Le fort Saint-Quentin répond d’ailleurs très efficacement aux batteries allemandes.

4 octobre. — Gardant encore, malgré tout, une dernière