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loin, comme s’il voulait pénétrer le secret de l’avenir. La tête du savant, modelée avec beaucoup de vigueur, reflète la puissance et la sérénité de la pensée. Le grand historien semble dire : « L’œuvre de ma génération est terminée. La voie est ouverte, les premiers jalons sont posés. A vous, ô jeunes, de faire le reste pour assurer le triomphe de demain. »

Aux extrémités basses du monument se dressent deux groupes symboliques : l’un représente l’effort du germanisme pour étouffer le réveil slave ; dans l’autre on voit le peuple tchèque se soulevant à la voix de l’Histoire ; il est encore sur les genoux, mais tout fait espérer que demain il sera debout. L’Histoire, sous les traits d’une vieille femme, raconte aux jeunes le passé de la Bohême ! Ce groupe est d’un effet saisissant. Puis, voici une figure impressionnante, celle de la Bohème écrasée après la Montagne Blanche ; c’est une jeune femme agonisante, image, foulée aux pieds des étrangers, de la patrie tchèque ; elle git là, à la droite de Palacky, encadrée de ses ailes comme un grand oiseau foudroyé. Au sommet du pylône, un autre groupe symbolique représente les trois pays de la couronne de Saint-Venceslas : la Bohême, la Moravie et la Silésie. A gauche, enfin, le Génie de la Nation est suspendu dans l’air, comme s’il traversait les espaces, poussant le cri de ralliement. Le monument est à la fois un hymne à la gloire de « l’organisateur de la nation » et un symbole des destinées tragiques du peuple tchèque.


HENRI HANTICH.