Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 10.djvu/417

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une femme ; il offre d’ouvrir sa maison aux docteurs de l’Eglise romaine pour achever l’instruction de la néophyte, de la confier, pour recevoir cette instruction, à son cousin germain et parrain, M. le Président, qui est un homme à ménager et qui semble bien avoir encouragé, sinon éveillé les premières inclinations de Madeleine vers le catholicisme, qui, avec des voisins du ménage désuni, a favorisé sa retraite au couvent. A peu de jours de là, le 13 novembre 1649), l’évêque de Saintes y recevait l’abjuration de Madeleine. Y prendra-t-elle le voile ? Cela ne nous étonnerait pas, mais à ce moment nous la perdons de vue. Tout ce que nous pouvons affirmer, — et c’est là que nous voulions en venir, — c’est que la justice, qui jusqu’ici ne s’est mêlée de rien, est amenée à accepter une séparation amiable par suite de laquelle l’héroïne de ce débat domestique se verra assigner le couvent de Notre-Dame de Saint-Vivien ou tout autre pour y résider pendant la vie de son mari.

L’importance de la cohabitation, considérée comme première conséquence et comme première condition de la puissance maritale, est si grande qu’on nous permettra de donner de nouveaux exemples de la façon dont l’obligation en était appliquée ou éludée. La femme qui quittait le domicile conjugal était forcée par la justice à le réintégrer. C’était là le principe. Encore fallait-il que la justice fût saisie. Quand le tribunal du bailliage de Bourges condamna Aimée Mahas, absente depuis un mois de son intérieur, à y reprendre sa place et à y remplir ses devoirs, ce fut sur la requête de son mari, Pierre Hurtault. Il n’est guère douteux pourtant que, si la séparation de fait donnait lieu à un scandale, la juridiction civile intervint d’office. Aux yeux de la juridiction spirituelle, le scandale résultait du fait même de la séparation non autorisée et elle avait à cœur de le faire cesser. En 1642, un mercier de Saint-Remy en Picardie nommé Tasse se vit refuser par le curé la communion pascale parce que, séparé de sa femme, il n’avait pas voulu, à l’occasion de Pâques, se réconcilier avec elle. Le doyen du chapitre d’Amiens, informé du fait par le curé au moment de sa visite pastorale, fit venir le réfractaire, lui fit sentir la gravité d’une situation qui n’était pas régularisée par l’Eglise et en obtint la promesse de faire son devoir.

Les circonstances qui pouvaient faire cesser la cohabitation étaient naturellement des plus variées. Dans un ménage pauvre