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le titre bavarois de baron de Deux-Ponts qui avouait leur origine paternelle. L’aîné avait épousé une Béthune-Sully, le second une Polastron, de cette maison qui se trouvait alors au comble de la faveur, grâce à la belle Diane de Polastron, duchesse de Polignac, l’amie de Marie-Antoinette. Ce dernier seul laissa un fils qui mourut général bavarois en 1859, sans postérité mâle. Terminons cette rapide biographie en indiquant que la comtesse de Forbach, retirée dans ses terres alsaciennes après la mort de Christian IV en 1775, sut encore se faire estimer et traiter avec déférence par le neveu et successeur de son époux, le duc Charles-Auguste II, comme on le voit par certains traits du récit de Mannlich. Nous la rencontrerons plus d’une fois sur notre chemin.


II

La petite cour qui entourait ces personnages princiers ou quasi princiers était plus qu’à demi française. Sans parler du secrétaire des commandemens, cet aimable et sûr Camasse de Fontenet qui resta jusque dans sa vieillesse l’un des meilleurs amis de Mannlich, le médecin, le chirurgien, le confesseur du duc, le gouverneur de ses pages et les précepteurs de ses héritiers étaient nos compatriotes. Un capitaine de l’artillerie française, M. de Vismes, parfait musicien et acteur excellent, avait été nommé sur le désir de Christian IV au commandement de la place de Bilsch, toute voisine de Zweibruecken, avec permission de résider le plus souvent dans cette dernière ville où il était l’âme des plaisirs artistiques de la cour ducale.

Un courtisan qui mérite une plus spéciale mention, c’est l’abbé Salabert dont le nom revient souvent sous la plume de Mannlich. Le baron de Gagern, dont nous avons déjà cité les Mémoires et qui fut en relations fréquentes avec Salabert, nous a tracé un utile portrait du personnage : « Ce pauvre prêtre du diocèse de Metz, écrit-il, était mieux qu’un abbé de cour comme on en a tant vu à cette époque. Plein de raison, d’esprit et de goût, et bien qu’il dissimulât sous ce brillant vernis toutes les passions des « roués, » il conquit d’abord l’amitié de la comtesse de Leyen, née Dalberg et sœur du primat de Cologne, une femme remarquable qui habitait le fief de Blieskastel, très voisin de Deux-Ponts, et introduisit Salabert à la cour ducale. Il