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ne peut le réduire ni par la force, ni par la faim, il le réduira par la soif.

Dès l’aube, avec une partie des tirailleurs, il occupe les puits ; Kouby Keita garde le camp.

Au matin, quelques indigènes sortent furtivement et se dirigent vers les points d’eau. Une décharge les accueille. Ceux qui n’ont pas été couchés par la salve s’enfuient terrifiés ; la ville se referme, et le calme s’étend de nouveau sur la plaine.

La journée s’écoule. Pas un homme ne se risque hors des murs.

Une fois, deux fois, le soleil se lève ; chaque jour, il éclaire les dix-huit tirailleurs montant la garde devant la forteresse qu’ils ont plongée dans la stupeur et dans l’effroi, la forteresse où reposent leurs chefs, immobile et silencieuse comme une tombe.

Pourlant le quatrième jour, les réserves d’eau de Zinder sont épuisées. Une sourde rumeur s’élève au-dessus des murs ; un grondement de bêtes affolées qui se préparent à mordre ; bientôt la cité entière hurle par des milliers de bouches ; il faut boire ! Les tam-tams et les trompes de guerre retentissent. Samba et Kouby se préparent au combat.

Dans l’après-midi, les portes s’ouvrent. Une nuée de guerriers se précipite vers les points d’eau ; une grêle de chevrotines, une nuée de flèches s‘abattent sur le sergent et ses tirailleurs. Calme, Samba commande le feu. En vain les premiers rangs ennemis s’écroulent sous les balles, la horde altérée piétine les corps, se rue sur les défenses derrière lesquelles le sergent tente de résister. La retraite va lui être coupée. Les sauvages sont trop !

Mais Kouby Keita est prêt à la contre-attaque. Du haut de la colline, il tombe sur le flanc des assaillans. Les détonations partent à bout portant, les flammes des fusils brûlent les faces ; les baïonnettes luisent… Samba est dégagé ; les tirailleurs reculent sur le campement, face à l’adversaire.

Les soldats d’Ahmadou, après un moment de surprise, sont enlevés de nouveau par le son des tam-tams et le mugissement des trompes, ils s’élancent à l’assaut du retranchement où se sont affaissés le caporal et deux hommes que leurs camarades ont soutenus jusque-là. Kouby Keita est blessé à mort.

Encore une fois la vague est repoussée.

Autour du mamelon, les ennemis tenus en respect se