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« dissolvant résiduel. » arrête au passage et réduit sur place les produits nitreux de la décomposition. Tant qu’il subsiste de l’éther dans la poudre, elle est ainsi préservée d’un échauffemient qu’on pourrait appeler normal.

Mais il en est d’anormaux, résultant du manque d’homogénéité de la masse. Les matières traitées ensemble dans une poudrerie pour faire partie d’un même lot de poudre B, qui portera un baptême unique et constituera officiellement une unité réglementaire comprenant souvent jusqu’à 40 tonnes d’explosif, passent par fractions séparées dans plusieurs appareils différons, à des momens successifs, de sorte que l’opération peut durer trois mois. On y incorpore d’ailleurs des poudres antérieures, parfois de plusieurs années. L’unité du lot est ainsi une fiction. Elle répond à cette seule condition que toutes les gargousses correspondantes donnent les mêmes résultats balistiques. Il est donc évident que le lot n’a pas été, dans toutes ses parties, soumis à des actions identiques. Le coton-poudre qui en est la base manquait lui-même d’homogénéité. Il en résulte des différences entre les charges extraites du même lot, entre les brins d’une même charge, entre les points voisins d’un même brin. Chacun évolue à sa façon ; certaines parties prennent de l’avance sur les autres, et, à égalité d’âge, sont réellement plus vieilles, plus près de leur mort, de la décomposition finale. En particulier, les impuretés du coton qui a servi de point de départ à toute la fabrication paraissent se traduire par des réactions locales donnant, au bout d’un certain temps, sur les brins de poudre, des taches de couleurs variables. Ces taches sont le siège de productions nitreuses qui les transforment en abcès verdâtres. Ces abcès s’étendent, provoquent des élévations de température considérables qui arrivent à dépasser les 180 degrés nécessaires pour l’inflammation de la poudre.

Toutes ces actions, nous l’avons dit, sont favorisées et puissamment accélérées par la chaleur. On a donné comme un résultat d’expérience, qu’une élévation de température, de seulement 10 degrés, rendait trois fois plus rapide la décomposition du coton-poudre ; et en vertu d’une loi générale de chimie, applicable aux explosifs, la loi de Van-t-Hoff, lorsque la température extérieure croît en progression arithmétique, la durée de décomposition totale devrait décroître en progression géométrique.

Mais l’influence de la température est encore moins néfaste