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LES MASQUES ET LES VISAGES
AU LOUVRE

DEVANT UN PORTRAIT D’ISABELLE D’ESTE

Connaissez-vous la salle où sont les dessins de Léonard de Vinci, entre le pavillon de Beauvais, où sont les meubles Louis XVI et le pavillon Marengo, où est la collection Thiers, au Louvre ? Parmi toutes celles que le touriste traverse d’un pas précipité, il en est peu qui lui inspirent une plus grande terreur de s’être égaré sans retour. C’est qu’il est loin des choses peintes, largement encadrées d’or, qui réjouissent sa vue de sujets discernables et fastueux. Il y est toujours seul et ne sait par où passer pour retrouver la foule. Ainsi arrive-t-il, au milieu d’une fête, qu’un salon à l’écart reste vide, et qu’aussitôt entré, le chercheur d’aventures ressorte, se croyant seul. Mais, ici, il n’a pas bien regardé. Il n’est pas seul. Les figures dessinées il y a quatre cents ans par Léonard retiennent quiconque aime à lire les yeux et les lèvres et au milieu, à la place d’honneur, est un profil de femme qui suffirait à remplir une journée de méditation, comme elle a rempli son siècle : c’est Isabelle d’Este.

C’est un peu de fusain, avec de très légères teintes de pastel et des ombres douces et fumeuses comme exhalées sur une