Hier, j’avais passé mon après-midi dans l’ancien couvent de San Severino à compulser des documens du XVe siècle, jaunis par les ans. Puis, j’avais regagné le Palais-Royal en descendant la colline qui domine le port. Là végétait, il y a quelques années, une population extraordinaire, entassée dans un quartier fait pour dégoûter du pittoresque les amateurs les plus incorrigibles de la couleur locale. Dans des rues étroites dont les maisons inclinaient systématiquement les unes vers les autres, sous des lambeaux de linge qui essayaient de sécher quand par aventure un rayon de soleil ou un filet d’air pénétrait jusqu’à eux, s’ouvraient des antres noirs, sordides, nauséabonds, dans lesquels on entrevoyait une agglomération de vieilles loqueteuses et d’enfans pouilleux. Au milieu des pelures d’orange, des épluchures, sur le sol gluant, des hommes travaillaient tant bien que mal à des métiers rudimentaires. L’étranger passait vite au milieu de cette région ténébreuse, semblable à un ange qui traverserait l’enfer, en laissant derrière lui comme un parfum de santé et en emportant des myriades de microbes. Rien de tout cela n’est plus. Quelques ruelles éventrées rappellent seules l’ancien cloaque. Des rues nouvelles, larges et triomphantes, parcourues par des tramways électriques, publient que Naples a cicatrisé par le fer et par le feu un ulcère infect et la population du quartier défunt est allée chercher ailleurs un gîte moins avarié.
Ce matin, j’achevais de m’habiller quand on est venu m’annoncer que la Fiorentina II avait jeté l’ancre, à l’aube, dans le