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de confiance ; mais ces derniers, par celle même extension du caractère familial qui a produit la mesnie et le fief, sont eux-mêmes assimilés à des parens. Le 2 mars 986, Louis V est installé sur le trône par le duc de France, en attendant le jour où celui-ci s’y placera lui-même. Louis V dit au duc et à ceux qui l’entourent :

« Mon père m’a enseigné que vous devez être pour moi des alliés, des cousins, que je ne devrais rien faire d’important en dehors de votre prudence. En vous réside mon conseil. »

Conseil qui comprend la famille du Roi, ses familiers, ses serviteurs, et dont la réunion forme sa cour, curia regis. Il tend à prendre un caractère régulier, il suit le prince en ses déplacemens ; mais jusqu’à la fin du XIIIe siècle il restera, conformément à ses origines, un conseil privé, un conseil de famille. Chroniqueurs et poètes l’appelleront la « mesnie du Roi. » Souvent aussi on le nommera la « chambre du Roi, » à cause du lieu « la Chambre » où il se réunissait d’ordinaire, distinguée de « la Salle » destinée aux audiences publiques.

D’autres fois le Roi délibère avec son conseil dans l’une des cours de son palais, ou sur une terrasse : « Au milieu il y avait un pin qui protégeait contre la chaleur ; la brise soufflait doucement ; une fontaine coulait par la gueule d’une chimère. C’est là que le Roi tint son parlement (délibération) avec son conseil principal. » (Girart de Roussillon.)

Joinville a laissé une vivante peinture de la manière dont se tenaient ces assemblées et cela dans les circonstances les plus graves, quand il nous montre, par exemple, saint Louis et ses barons délibérant à Saint-Jean-d’Acre, en août 1250, sur la question de savoir si le Roi demeurerait en Terre Sainte ou rentrerait en France.

C’est le « grand conseil » au sein duquel ne tarda pas à se constituer le « conseil étroit, » composé des princes du sang des pairs de France et des principaux officiers du monarque

Avec ses grands vassaux, ses conseillers et ses serviteurs, le Roi mené une vie patriarcale ; princes et subordonnés forment une seule « maison, » une même « famille, » comme dit précisément le chroniqueur Geoffroi de Beaulieu. Leurs enfans sont élevés ensemble à la Cour ; ils y sont instruits au métier des