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marchaient, et lignes de bataille, colonnes, artillerie, cavalerie, généraux, grand état-major, tout suivait.

Dans cette nouvelle direction, l’armée impériale ne tarda pas à atteindre des crêtes de vallons d’où elle voyait devant sa droite, sur la crête même, le village et le moulin de Krippendorf ; devant son centre, un peu en arrière, sur le versant de la hauteur opposée le village de Vierzenheiligen ; devant sa gauche, et au loin à son extrême gauche, le grand bois d’Isserstedt, qui couvrait le village de ce nom. Sur cette seconde ligne de bataille, absolument perpendiculaire à sa première, Tauenzien venait de reprendre désespérément et stoïquement position avec ses troupes décimées et quatre bataillons frais (des Saxons) qui, bivouaques beaucoup plus en arrière, avaient deux-mômes marché au canon. Tauenzien établit les Saxons et une batterie sur les pentes Sud de Vierzenheiligen et les débris de son corps, présentant encore la valeur de 5 bataillons et de 6 escadrons, au Nord de ce village, avec un fort détachement avancé au village et au moulin de Krippendorff.

Claparède (corps Suchet), qui formait l’aile marchante, attaqua le village et le moulin, s’en empara vite et commença de gravir le plateau opposé. L’Empereur, arrivé en première ligne, fait mettre en batterie 44 pièces de 12 de la Garde pour combattre les pièces saxonnes, et il lance sur Vierzenheiligen le 40e d’infanterie qui s’avançait en échelon à la gauche de Claparède. Les Saxons sont refoulés jusqu’au village ; mais là ils résistent énergiquement, arrêtent les assaillans et les repoussent. Ce succès anime Tauenzien à une contre-attaque. Il dirige ses fantassins et ses hussards contre le 40e en retraite et contre le 34e et reprend Krippendorf et le moulin.

À ce moment, l’Empereur entendit le canon derrière lui. C’était le bruit du combat que menait victorieusement vers Lehesten Soult contre le petit corps d’Holtzendorff. Mais Napoléon était sans renseignemens ; il ne pouvait savoir si Soult avait l’avantage ou s’il était ramené par des forces très supérieures, auquel cas le gros de son armée risquait d’être pris entre deux feux. Ses craintes à cet égard étaient sans doute très modérées ; car il avait dans la main le corps de Lannes et la Garde, et les têtes de colonnes de Ney et d’Augereau débouchaient à sa gauche. Obéissant toutefois aux suggestions de la prudence, il arrêta Lannes qui se préparait à une nouvelle attaque sur