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façon que l’état-major prussien dut changer sans cesse ses dispositions stratégiques. Chaque jour ou à peu près, on écartait le plan arrêté la veille, pour en décider un nouveau, qui était abandonné le lendemain. Brunswick, informé les 7 et 8 octobre de la marche des Français vers le Frankenwald, avait naturellement renoncé à son projet d’offensive en Franconie, et, combinant un nouveau plan, il avait envoyé des ordres pour un rassemblement général au sud de Weimar, dans le triangle dont la base est formée par la Saale, de Rudolstadt à Kahla, et le sommet par le village de Blankenhain. Il comptait que son armée se trouverait là en bonne position soit pour résister aux Français s’ils s’avançaient sur la rive gauche de la Saale, soit pour se porter elle-même sur la rive droite et les attaquer en flanc dans leur marche présumée vers Leipzig. Brunswick se bornait à marquer à ses lieutenans les positions à occuper, il ne leur révélait rien de ses desseins éventuels pour la défensive ou l’offensive. Lui-même d’ailleurs s’en remettait aux circonstances. Les circonstances décidèrent si bien que la nouvelle de l’attaque de Schleiz et de la défaite de Saalfeld le détermina à rester sur la défensive. D’après ses nouvelles dispositions du 11 octobre, le quartier général revint à Weimar ; les divisions de l’armée principale concentrées près de Blankenheim ou en marche pour s’y réunir rétrogradèrent sur Weimar, Hohenlohe évacua toute la rive droite de la Saale et s’établit entièrement sur l’autre rive, sa gauche à Iéna, sa droite à Kapellendorf. Ces mouvemens s’opérèrent dans la soirée du 11 et la journée du 12.

Les colonnes françaises poursuivaient leur mouvement enveloppant dans la direction de Leipzig. Le 12 octobre, Murat marche de Géra sur Zeilz et Nambourg ; Bernadotte de Géra sur Zeitz, à la suite de Murat ; Davout de Mittel-Pöllnitz sur Naumbourg ; Lannes de Neustadt sur Iéna par la rive gauche de la Saale ; Ney de Schleiz sur Auma et Mittel-Pöllnitz ; Soult de Weyda sur Géra ; Augereau de Saalfeld sur Kahla ; Napoléon, avec la Garde, d’Auma sur Géra. Le contentement de l’Empereur éclate dans ses lettres. Il écrit à Lannes : « Je leur barre le chemin de Dresde et de Berlin. » Il écrit à Murat : « J’enveloppe tout à fait l’ennemi. » Il écrit dans le deuxième Bulletin : « L’armée prussienne tournée par sa gauche, prise en flagrant délit au moment où elle se livrait aux