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La journée d’Iéna




I




I. — LES PRÉLIMINAIRES

Le coup de foudre d’Austerlitz avait terrassé l’Autriche, mais le Tsar, si découragé qu’il fût, n’avait fait aucune ouverture de paix, et la Prusse, malgré les efforts pacifiques du comte de Haugwitz, gardait une attitude équivoque. Et il y avait encore, il y avait toujours l’Angleterre. Les huit premiers mois de l’année 1806 se passèrent en multiples négociations officielles ou secrètes entre les cabinets et les cours. En attendant, Napoléon maintenait dans les vastes cantonnemens de la vallée du Danube son armée victorieuse, prêt à faire face aux Prusso-Russes ou à fondre sur les Autrichiens par Salzbourg, si ceux-ci se refusaient à exécuter toutes les clauses du récent traité de Presbourg. Mais, alors, Napoléon voulait la paix et il la croyait à peu près certaine. Il ne pouvait penser que la Prusse qui, en raison des circonstances, devrait former, avec sa belle armée, le tranchant d’une nouvelle coalition, risquerait de subir le premier choc, quand l’année précédente elle s’était refusée de marcher avec 200 000 Russes et Autrichiens.

Le 3 novembre 1805, en effet, un traité d’alliance entre la Prusse, l’Autriche et la Russie avait été signé à Potsdam, et la nuit suivante, dans une scène d’un romantisme à la Schiller préparée par la reine Louise, Frédéric-Guillaume et Alexandre s’étaient juré amitié et fidélité devant le tombeau de Frédéric II,