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essentiel, pour l’avenir même de l’Algérie, de resserrer les contacts avec la France. Certes, les Algériens sont persuadés que leur budget spécial porte encore et portera longtemps les témoignages de la bienveillance métropolitaine, mais il est dans la nature humaine de montrer moins de reconnaissance pour les bienfaits acquis que d’ardeur à en solliciter de nouveaux. Ici apparaît une fonction régulatrice du gouvernement général. Il arrive aux chefs de services algériens de se trouver pris entre des influences contradictoires, lorsqu’ils s’efforcent de tenir l’équilibre entre les revendications d’intérêts algériens et les exigences des apports français. Le personnel des fonctionnaires tend à se recruter seulement dans la colonie, et pas seulement pour les emplois secondaires ; il en sera ainsi, de plus en plus » surtout lorsque les candidats trouveront, en Algérie même, toutes les facilités de préparation ; ce mouvement est naturel et nous l’estimons irrésistible, mais il faut veiller expressément à ce qu’il ne devienne pas exclusif.

Les budgets des services algériens prévoient des crédits pour « passages en France ; » dans la presse locale et jusqu’aux Délégations, ces crédits ont été à plusieurs reprises discutés, comme favorisant l’exode estival de nombreux contribuables, et raréfiant d’autant les dépenses faites dans la colonie. Ce sont là critiques à courte vue : l’Algérie ne se fera jamais trop connaître par ceux qui l’auront pratiquée, même s’ils n’y ont pas rencontré seulement des satisfactions. A-t-on jamais mesuré ce que ces voyages de vacances de ses fonctionnaires lui avaient attiré de visiteurs, de capitaux, voire de nouveaux résidens ? La propagande spontanée de ces déplacemens est l’une des plus économiques et des plus efficaces. De plus, ces passages fréquens entretiennent les relations, rafraîchissent chez les Algériens les souvenirs de leur pays d’origine, font circuler d’un bord à l’autre de la Méditerranée des hommes et des idées de France ; c’est une des nécessités de l’expansion française.

La colonisation proprement dite est nécessaire, ou, pour être plus exact, le peuplement français. Les lois sur la vente et la concession des terres en Algérie juxtaposent aujourd’hui l’achat à la gratuité ; suivant le texte organique du 13 septembre 1904, deux tiers des lots à concéder ou à vendre doivent être réservés aux immigrans, un tiers aux Algériens. Ces derniers sont toujours les plus empressés à demander des concessions ou à