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à l’ancien régime, bien que tout dévoué aux idées nouvelles.

Fitte de Soucy, que l’arrêté du Premier Consul appelle simplement le citoyen Fitte, est le fils du marquis de Fitte de Soucy, officier général ; sa mère a été sous-gouvernante des enfans de France comme sa mère à elle, la baronne de Mackau. Fitte a débuté dans la carrière diplomatique en 1792 comme attaché à la mission de son oncle Mackau, ministre de France à Naples. Après la mort d’Hugon de Basseville, représentant diplomatique à Rome, assassiné dans une émeute par la populace romaine, il s’est occupé de faire valoir auprès de la Convention les réclamations de la veuve, et a ensuite épousé celle-ci. Décrété d’arrestation sous la Terreur, il réussit à se dérober au tribunal révolutionnaire en restant caché dans une mansarde, où sa femme venait la nuit en secret lui apporter à manger. Sauvé, comme tant d’autres, par la chute de Robespierre, il reprit du service en qualité de commissaire des guerres : c’est ainsi qu’il connut Lannes pendant la campagne d’Italie et qu’il sut se faire apprécier de lui. Un traitement de six mille francs lui était assigné. Esprit ouvert et souple, tout dévoué à Lannes, Fitte, par ses manières comme par ses connaissances, était bien fait pour guider l’inexpérience diplomatique de son chef.

Lannes emmenait également avec lui, outre son secrétaire particulier Alex. Henri, plusieurs officiers d’ordonnance, jeunes gens plus habitués aux camps qu’aux salons, et dont les manières cassantes ainsi que le manque d’éducation allaient créer à leur chef de réels ennuis.


II

De Lectoure, sa ville natale, Lannes part le 19 pluviôse an X (8 février 1802), accompagné de son secrétaire de légation Fitte ; Mme Lannes et ses enfans le rejoindront plus tard. Il ne s’arrête à Madrid que le temps nécessaire pour visiter la Cour d’Espagne et en repart aussitôt le 1er germinal (22 mars). À peine a-t-il touché le sol portugais qu’il s’y trouve l’objet d’une réception particulièrement brillante ; à Elvas, ville frontière et place forte, une garde d’honneur est sous les armes ; elle l’accompagnera jusqu’à Lisbonne ; dans toutes les localités importantes, les premières autorités viennent au-devant de lui, le canon tonne et il trouve « des préparatifs qui le préservent des désagrémens