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savoir ce qu’il en adviendra, si et dans quel sens le roi George en fera usage. Pour cela, il faudrait savoir ce qu’il sera. Quelques-uns de ceux qui ont déjà écrit sur lui prétendent le deviner. Je n’ai pas cette prétention. Je voudrais me borner à dire ce qu’incontestablement il est.

D’abord, il est un marin : Our sailor King ; c’est le surnom que le populaire lui a déjà donné. Il avait onze ans et demi lorsqu’il fut envoyé par son père à bord du vaisseau-école la Britannia. Avant que la mort du duc de Clarence ne l’eût fait héritier présomptif du trône, sa vie entière s’était passée à bord. Il a déjà visité toutes les parties du vaste empire qu’il est appelé à gouverner. En Angleterre, on aime les marins, et c’est déjà un élément de popularité.

Il est un époux modèle, père de cinq enfans. La calomnie s’était efforcée de l’attaquer dans sa vie privée. Elle a dû se taire devant l’évidence des faits et devant une sentence judiciaire. Il offrira à l’Angleterre le spectacle, que ne lui ont pas toujours donné tous ses rois, d’un ménage exemplaire. L’Angleterre pieuse et respectable lui en saura gré, et ceux, celles surtout, qui déjà se plaignent ou qui raillent l’austérité de la future Cour n’oseront pas le faire trop haut. L’opinion ne serait pas avec eux.

Il est un consciencieux. Tous les devoirs de son métier, car Louis XIV lui-même parlait du métier de roi, il les accomplit scrupuleusement. On sent qu’il ne manquera jamais à aucun, depuis les plus petits jusqu’aux plus grands. Ces devoirs rempliront sa vie et celle de la Reine, accoutumée dès l’enfance par sa mère à l’exercice de la charité. Déjà tous deux ont témoigné de l’intérêt qu’ils portent aux classes pauvres. Ils ont organisé, pour la semaine prochaine au Palais de Cristal, une immense fête à laquelle prendront part 100 000 enfans des écoles de Londres. Tous ceux, et ils sont nombreux en Angleterre, qui se préoccupent de la question sociale, comptent beaucoup sur eux. L’Armée du Salut en particulier se targue de la bienveillance de la Reine.

Enfin George V est un vrai Anglais, par ses habitudes de vie, par ses goûts de sport, par son attachement aux traditions. Mais en même temps il a le sentiment des nécessités démocratiques. Il a voulu qu’un certain nombre de représentans des Trades Unions fussent invités aux fêtes du Couronnement