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moins impérialistes que les Unionistes. Mon confrère et ami Paul Bourget disait, il y a quelques jours, dans l’éloquent discours dont il a honoré mon modeste Orphelinat Alsacien-Lorrain, que la France n’était pas un empire, mais un royaume. Il reconnaîtrait aujourd’hui que l’Angleterre qu’il aimait tant, dont il a si bien parlé, n’est plus un royaume. Elle est un empire. Est-ce une force, est-ce un danger ? L’avenir en décidera. En attendant, c’est une gloire et l’Angleterre est résolue à s’en parer. Hier, une place a été faite à Westminster aux drapeaux des colonies. Aujourd’hui, dans le cortège royal, une place plus importante encore sera faite à leurs troupes et à leurs représentans. C’est la fête des Dominions presque autant que la fête de l’Angleterre.

Le cortège se forme en deux endroits. Sur l’Embankment, près de Westminster, se rassemblent précisément les deux sections coloniales et indiennes. Les premiers ministres des cinq Dominions seront dans des voitures avec d’autres représentans des colonies, et suivis par des détachemens de leurs troupes Dans la section indienne figureront, soit en voiture soit à cheval, en costumes de leurs pays, constellés de pierreries, les deux sultans de Perak et de Kedah, plusieurs Maharajas ou Rajas et même deux princesses indiennes, la Thakore Sahiba de Gondal et la Begum de Bhopal que j’avais déjà remarquée hier à Westminster entièrement recouverte d’un immense domino bleu pâle (je ne puis vraiment pas trouver un autre mot), qui la dissimulait de la tête aux pieds, et la figure recouverte d’un masque avec deux trous pour les yeux. Tout le monde s’accorde à dire que la section indienne était ce qu’il y avait de plus brillant et de plus intéressant. Malheureusement je ne l’ai pas vue hier, puisque j’étais à l’intérieur de l’Abbaye et ne la verrai pas encore aujourd’hui. Ce n’est pas que je m’en plaigne, car je suis très aimablement invité à assister, des fenêtres d’une maison qui est située à Hyde Park Corner, tout près de Aspley House, la célèbre maison du duc de Wellington, au passage du cortège royal.

Le temps est menaçant depuis ce matin. On sent que la pluie a envie de tomber, et on dirait qu’elles n’ose pas. Pleuvoir sur le Roi et la Reine. Songez donc ! Il tombe bien quelques petites averses, mais ou n’en convient pas. De la fenêtre où je suis placé, le coup d’œil est superbe sur Green Park, Constitution