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nouveau. On sait que la maladie soudaine du roi Édouard fit ajourner la cérémonie. Quand son état de santé permit de la célébrer, on l’abrégea pour ménager ses forces. C’est ce cérémonial abandonné qui a été repris pour le couronnement du roi George. La cérémonie a duré près de deux heures ; elle se divise en dix-neuf sections. Je n’ai pas l’intention d’en énumérer tous les détails. Je me bornerai à signaler ce qui en a marqué à mes yeux le principal caractère et ce qui m’a particulièrement frappé.

C’est d’abord le caractère à la fois religieux et politique de la cérémonie. L’Église anglicane y joue un rôle beaucoup plus considérable encore que je ne me l’imaginais. L’archevêque de Cantorbery, primat d’Angleterre, y tient la première place. Ce n’est pas seulement lui qui consacre ; c’est lui qui parle, agit, questionne, et pose des conditions. C’est le Roi qui répond et accepte. Par momens, on dirait un Pape couronnant au moyen âge un empereur allemand, après que l’Empereur consacré aurait promis fidélité au Saint-Siège, On pourrait croire que le Roi tient sa couronne de l’Église anglicane, et, si ces apparences étaient conformes aux réalités, l’Église établie serait encore singulièrement forte en Angleterre ; mais il y a loin de ces apparences à la réalité.

C’est ensuite l’affirmation simultanée des droits du Roi et des droits du peuple. « ces droits, disait Retz, qui ne s’accordent jamais mieux que dans le silence. » Au cours de toute la cérémonie, ils s’accordent au contraire dans des formules heureusement combinées. Et ici ce n’est plus une vaine apparence, c’est au contraire une réalité de tous les jours. La confiance mutuelle que cet accord durera fait aujourd’hui la grandeur de la cérémonie ; elle a fait depuis un siècle et continuera de faire dans l’avenir la force de l’Angleterre.

C’est enfin, à un tout autre point de vue, la ressemblance de la partie purement religieuse du service avec un service catholique. Pour avoir assisté autrefois à Oxford à des offices anglicans, je savais combien ces offices sont, par certains points, semblables aux nôtres. Mais la ressemblance est plus grande encore que je ne le croyais, non pas seulement au point de vue des chants et de la musique, mais au point de vue des rites eux-mêmes. J’ai eu tout le temps le sentiment d’assister à une véritable messe, moins l’élévation et la consécration, ce qui,