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désintéressait de la suite du débat, et son absence a eu les conséquences qu’on va voir. Le gouvernement avait annoncé l’intention de déposer une loi nouvelle, qui compléterait l’ancienne par l’institution d’une assurance contre l’invalidité et par certains abaissemens d’âge. On lui a demandé, puisque ses idées semblaient arrêtées, de distraire quelques articles de la loi prochaine et, pour en assurer le vote avec plus de sûreté et de rapidité, de les introduire dans le budget de 1912, M. Caillaux s’est refusé avec une grande énergie d’accent, non pas à distraire certains articles du projet en préparation, mais à les introduire dans le prochain budget : son opposition à cet égard a été absolue. Après l’avoir faite, il s’en est allé, et le gouvernement a accepté un ordre du jour déposé par M. Dalimier. Cet ordre du jour, long et diffus, a été voté par la Chambre phrase par phrase, — car on avait demandé la division et la subdivision, — avec des majorités diverses, mais toujours très élevées et qui, dans le scrutin sur l’ensemble, a été de 356 voix contre 64. Nous passons les premiers paragraphes qui n’ont pas d’importance, celui par exemple où la Chambre exprime la confiance que le gouvernement appliquera la loi avec autant de prudence que de fermeté. C’est ce que le Sénat avait déjà dit. Mais la Chambre a ajouté que, d’après elle, « le moyen le plus efficace d’assurer l’application de la loi était de l’améliorer dans le plus bref délai possible et qu’elle comptait sur le gouvernement pour déposer un projet de loi dont il acceptera l’incorporation dans le budget de 1912. » Ce dernier membre de phrase a été voté par 388 voix contre 155. Que devenait l’opposition de M. Caillaux à cette incorporation ? M. Aynard la demandé ; il s’est étonné de voir le gouvernement accepter à la fin de la séance une disposition qu’il avait repoussée au début : on lui a répondu que c’était avec l’adhésion de M. Caillaux et, comme M. Caillaux n’était plus là pour expliquer une aussi surprenante volte-face, il a fallu se contenter de cette affirmation. Étrange attitude, soit dit en passant, que celle de M. Caillaux dans cette affaire : souhaitons qu’il n’en fasse pas la règle de son ministère ! Enfin l’ordre du jour Dalimier porte que la loi prochaine abaissera à soixante ans l’âge où l’allocation de l’État sera attribuée. Soixante ans au lieu de soixante-cinq : combien de millions ce changement coûtera-t-il au budget ? Nul ne le sait. Nous nous rappelons la résistance courageuse que M. Cochery, alors ministre des Finances, faisait à cette disposition qui devait, à l’en croire, faire peser sur le budget une charge excessive. Il n’hésitait pas à poser la question de confiance pour éloigner ce cauchemar. Les choses ne sont pas