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Les Associations ouvrières de production sont en grande partie groupées dans quelques départemens industriels. La Seine en possède 198, dont 150 à Paris ; le Rhône, 22, les Bouches-du-Rhône, la Loire, la Haute-Vienne, le Finistère et le Jura, chacun une douzaine environ.

Mais le classement professionnel des Associations est beaucoup plus intéressant que leur distribution géographique. Tout d’abord, il convient de faire une distinction très importante. Les Associations qui vendent des produits fabriqués, comme la Verrerie ouvrière, la Chocolaterie ouvrière, sont bien des coopératives de production proprement dites. Mais les Associations de cochers, de charpentiers, de peintres, de paveurs et de typographes, les « salons de coiffure, » bien d’autres encore, ne sont pas autre chose que des « Associations de travail. » De plus, ces « Associations de travail » sont justement celles qui sont susceptibles de recevoir les commandes de l’État, ou des grandes municipalités ; et ce n’est pas là une simple présomption. La Chambre consultative des Associations de production défend avec passion les « droits » de ses clientes, en multipliant les démarches auprès des ministres, et faisant au besoin mouvoir, « pour le bon motif, » l’éternelle influence parlementaire. Ses délégués parcourent les départemens, reçoivent les doléances des Sociétés, réchauffent le zèle des préfets, signalent aux ministres de l’Intérieur et du Travail ceux dont la tiédeur coopérative est persistante. Aussi n’y a-t-il plus aujourd’hui de ministère, plus d’administration publique, où les « Associations de travail » ne soient assurées de trouver des travaux, soit par voie d’adjudication, soit de gré à gré, avec dispense de cautionnement, quand le devis est inférieur à 50 000 francs. Constructions de lycées et d’hôtels des postes, aménagement de « salles de fêtes » ministérielles, entretien des édifices diocésains, des théâtres subventionnés, pavage des rues, fournitures de bancs scolaires, réfection des fauteuils de la Cour d’appel, toutes ces entreprises occupent continuellement des ouvriers associés, charpentiers, menuisiers, maçons, peintres, tapissiers, serruriers, paveurs, replanisseurs de parquets. Le Journal officiel est imprimé « en coopération ; » l’Imprimerie Nouvelle, de la rue Cadet, travaille pour la Préfecture de police ; les Coiffeurs de France sont adjudicataires de la coupe des cheveux à l’hôpital Laennec.

Aussi, beaucoup de ces Associations tirent des commandes