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Contre les traditions paternelles, héritage que le temps nous a transmis, aucun raisonnement ne saurait prévaloir, quoi qu’imaginent les plus grands génies [et c’est Tirésias qui parle]. La puissance divine se meut avec lenteur ; mais son effet est infaillible. Elle châtie les hommes qui pratiquent l’iniquité et dont l’esprit pervers frustre les Dieux d’un hommage légitime. Elle dérobe à l’impie la marche insensible du temps et guette en secret sa proie, car on ne doit rien concevoir, rien imaginer qui soit supérieur aux lois divines. On risque peu à reconnaître la force d’un être suprême, quel qu’il soit, et des lois éternelles qui ont leur principe dans la nature et leur sanction dans le temps… La science, je ne l’envie pas. Il y a de la grandeur aussi et de la gloire à vivre pieusement en prenant jour et nuit la vertu pour règle de conduite et à honorer les Dieux en rejetant ce qui est contraire à la justice… [et c’est le chœur qui parle].

« Il semble, ajoute ici M. Masqueray, que l’on entende la voix même d’Euripide… »

Oui, sans doute ; mais il semble qu’on entende plutôt la voix même d’Aristophane, comme aussi celle de Sophocle. Aristophane aurait dû tenir compte à Euripide d’avoir, avant de mourir, donné raison, à très peu près, à Aristophane.

Émile Faguet.