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III

Ce qui vient d’en être dit nous permet d’examiner maintenant à quelles conditions il sera en mesure de répondre parfaitement à sa destination.

La plus essentielle de toutes, c’est qu’il jouisse d’une très large indépendance. Il faut qu’il soit libre de substituer des enseignemens nouveaux à des enseignemens anciens, libre de choisir, sous certaines garanties, les savans à qui seront attribuées ses chaires, libre enfin d’adapter la forme de chaque enseignement, non pas à des convenances extérieures, mais aux intérêts bien entendus de la science, expliquons-nous rapidement sur chacun de ces points.

Une des choses qui ont souvent gêné l’essor du Collège de France, c’est l’incertitude où l’ancien règlement le laissait sur ses droits en matière de transformations de chaires. Il pouvait arriver qu’un ministre considérât une chaire transformée comme une chaire nouvelle, et qu’il usât dès lors du droit qu’il possède de nommer directement les titulaires des chaires nouvellement créées, sans présentation, ni par l’établissement intéressé, ni par les Académies compétentes. Il suffisait- que cela fût à craindre pour que le Collège se décidât difficilement à proposer la transformation d’une chaire. Cette appréhension et cette gêne disparaîtront, s’il est bien entendu que la proposition d’affecter un crédit déjà existant à un enseignement nouveau, fût-il d’ailleurs très différent de celui auquel il succède, laisse le Collège en possession du droit de présentation. C’est ce qui résulte des termes du règlement nouveau. Cela est indispensable, si l’on veut qu’il remplisse comme il convient sa fonction propre. La faculté d’évoluer sans peine est pour lui une condition vitale. Il représente, dans l’enseignement supérieur, l’adaptation rapide et constante aux progrès de la science. Cesser de se transformer, s’enfermer dans un cadre rigide, ce serait de sa part manquer à sa destination même.

Mais cette liberté que le gouvernement reconnaît au Collège, il importe que l’opinion publique, quelquefois mal éclairée, ne la lui conteste pas hors de propos. On s’est étonné de lui voir, en certaines circonstances, proposer la transformation de