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droit canon. Au début du XVIIIe siècle, nous y voyons paraître la botanique avec Tourneforten 1706 ; mais c’est surtout dans la seconde moitié du siècle, sous l’influence du mouvement général des esprits, que la vie et le développement du Collège reprennent quelque essor. L’astronomie s’y fait admettre en 1760 avec Lalande, la physique générale en 1769 avec Cousin ; puis, en 1773, simultanément, l’anatomie avec Portal, la poésie latine avec Delille, la littérature française avec Aubert, le droit de la nature et des gens avec Bouchaud ; en 1774, la chimie ; en 1776, l’histoire et la morale ; en 1778, l’histoire naturelle avec Daubenton ; en 1786, la mécanique et la physique expérimentale ; en 1795, le turc et le persan. Ces créations multipliées étaient vraiment un signe des temps et un témoignage du rôle que l’opinion publique attribuait aux professeurs royaux. Le XVIIIe siècle, par ses philosophes, ses penseurs, ses savans, avait beaucoup fait pour le progrès des connaissances humaines. Les recherches, les curiosités nouvelles, qui s’étaient produites dans les académies ou dans les sociétés privées, venaient tour à tour se faire donner une sorte de consécration officielle dans les enseignemens du Collège de France. Et il n’y avait alors rien, dans notre pays ni dans aucun autre, qui fût comparable pour la variété ou la valeur scientifique au groupement ainsi constitué.

La haute idée que les esprits les plus éclairés se faisaient du Collège et de sa destination se manifesta d’une manière intéressante et curieuse dans les projets de réorganisation, aussi grandioses que peu pratiques, dont il fut l’objet pendant la Révolution et le premier Empire. Heureusement, il se trouva défendu par les circonstances contre les réformateurs, et il resta ce qu’il était. Grâce à cela, la glorieuse histoire de la science au XIXe siècle est si intimement mêlée à la sienne qu’il est devenu impossible de les séparer. Comment rappeler ici, même sommairement, les titres de tant de maîtres illustres, qui se sont succédé sans interruption dans ses chaires ? Ce que les sciences physiques et chimiques ont dû à Biot, à Ampère, à Thénard, à Polouze, à Regnault, à Balard, à Berthelot, à Mascart, n’est ignoré de personne. L’histoire naturelle a été représentée, on sait avec quel éclat, par Cuvier, par Elie de Beaumont, Flourens, Fouqué, Marey ; la physique mathématique par Joseph Bertrand ; l’astronomie et la mécanique céleste par Delambre, Serret, Maurice