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donner que de médiocres résultats. « L’Université de Paris au XVIe siècle, a dit Ernest Renan, dans ses Questions contemporaines, atteignit le dernier degré du ridicule et de l’odieux par sa sottise, son intolérance, son parti pris de repousser toutes les études nouvelles. Il fallut que la royauté, qui, par sa puissante tutelle, avait presque affranchi l’Université de l’Eglise, prît sous sa protection, contre l’Université, le mouvement scientifique, et, par le Collège de France au XVIe siècle, par les Académies au XVIIe, créât un contrepoids à ces habitudes de paresse, à cet esprit de négation malveillante dont les corps purement enseignans ont beaucoup de peine à se préserver. » Seule, en effet, une création royale était en état de s’imposer, avec l’appui moral des esprits les plus éclairés. Cette création, François Ier l’avait conçue d’abord comme quelque chose de très grand, qui devait témoigner de sa magnificence ; Son irrésolution naturelle, jointe à des difficultés de plusieurs sortes, réduisit fâcheusement ces beaux projets. Au mois de mars 1530, six professeurs royaux furent nommés, deux pour le grec, trois pour l’hébreu, un pour les mathématiques ; mais il n’y eut pas, à proprement parler, de Collège de France, car ils enseignèrent en divers locaux et ne paraissent pas avoir formé, au début du moins, une corporation autonome.

Quoi qu’il en soit, l’institution était féconde. « Le nouvel enseignement, dit M. Le franc, si précaire et si incomplet qu’il fût, marque dans l’histoire de la pédagogie et de l’instruction publique en France un progrès décisif. Il rompait en visière avec des habitudes et des préjugés séculaires, substituant la liberté à la routine, l’esprit à la lettre. Plus de grades obligatoires, plus de licence pour enseigner, plus de frais d’études arbitraires et monstrueux : des cours indépendans, gratuits, ouverts à tous ; le grec et l’hébreu envahissant l’Ecole. » Le succès de ces cours témoigna immédiatement de leur utilité. Les étudians se pressèrent en foule autour des chaires de Danès et de Toussaint, professeurs de grec, de Vatable et de Guidacerius, qui enseignaient l’hébreu, d’Oronce Fine, qui donnait des leçons publiques de mathématiques. Et, parmi ces étudians, figuraient quelques hommes destinés à une prochaine illustration, de futurs érudits tels que Turnèbe, des semeurs d’idées ou des conducteurs d’hommes, tels que Calvin, Ignace de Loyola, Rabelais. Affranchis des règlemens étroits et des méthodes