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Montrer comment, de l’une de ses phases à l’autre, l’enfant apprend à raisonner, par induction ou par déduction, à perfectionner sa mémoire, à faire servir plus ou moins ses habitudes à ses progrès, ce serait là reprendre de biais la psychologie tout entière. Sans nous exposer à rien de pareil, notons ici certaines idées que les « nouveaux psychologues » ont essayé d’accréditer sur l’esprit de l’enfant, et demandons-nous ce qu’il faut en penser.

En deux mots, la nouvelle psychologie rend de très grands services par ses études analytiques ; mais ces services, elle en compromet un peu la valeur par l’abus même de l’analyse. Elle oublie que l’esprit et le cœur de l’enfant ne sont pas faits de phénomènes hétérogènes qui se juxtaposent, que l’âme de l’enfant est une organisation complexe et une où tout se tient, avec des corrélations nombreuses comme avec des compensations, que le tout enfin se développe à travers des milieux dont l’action est tantôt facile et tantôt difficile, ici acceptée avec docilité, là modifiée, ici durable et là passagère.

Le nouveau psychologue, assez dédaigneux pour ses devanciers, entre dans une réunion d’enfans. Il y arrive muni d’appareils enregistreurs, avec des graphiques tout préparés. Il fait lire au tableau et mesure la grandeur des lettres lues à une distance mesurée elle-même avec précision. Il fait apprendre une pièce renfermant tant de vers et il inscrit le nombre de minutes et de secondes au bout desquelles chaque enfant l’aura apprise. Il pose des questions qui lui feront mesurer ce que l’enfant a d’imagination ou visuelle ou auditive et le degré de son aptitude à devenir peintre ou musicien. Il compte ce qu’il faut à l’un et à l’autre de minutes pour trouver cinquante mots, pour reconstituer une phrase où l’on a supprimé un mot, deux mots, trois mots, pour additionner dix chiffres ou vingt chiffres, de même qu’il compte combien de coups chacun d’eux peut taper sur sa table sans se dire fatigué. Il se fera fort de fixer par le dynamomètre la cause organique de la paresse, car il mesurera, d’un côté, la force musculaire et, de l’autre, le degré d’indifférence ou de réaction à des excitations tenues, à tort ou à raison, pour caractéristiques. Il fera enfin composer en un même jour toute une troupe de garçons et de fillettes sur cette