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des étudians la loi sur l’état civil lui avait réservé des humiliations douloureuses. La comparution devant les nouveaux officiers d’état civil, que les catholiques privés de prêtres se refusaient à considérer comme l’équivalent d’un sacrement, avait tout de suite paru suffisante à beaucoup de protestans, qui pourtant avaient toujours leurs pasteurs comme voisins ; et c’est pour l’Eglise évangélique que les premiers effets du mariage civil se révélaient comme néfastes. A Berlin, du jour au lendemain, les trois quarts des fiancés d’origine protestante négligeaient de faire bénir leur union ; partout croissait le nombre des enfans non baptisés. Du jour où les pasteurs avaient perdu la direction de l’état civil, la désertion de leurs fidèles avait commencé : on allait à eux lorsqu’ils fonctionnaient en officiers de l’Etat ; mais désormais, il ne restait plus en eux que les officiers de Dieu, et on les oubliait. La loi qui les avait destitués de leurs fonctions bureaucratiques avait ainsi décimé leur clientèle religieuse : faite contre les curés catholiques, c’est à la pratique religieuse dans l’Eglise évangélique que cette loi portait un coup terrible. D’étranges contrastes frappaient les regards : les diocésains de Fulda ou de l’Eichsfeld, impatiens de se faire confirmer, s’en allaient au nombre de 2 500 ou de 6 000, jusqu’en Hesse ou jusqu’en Hanovre, pour recevoir le sacrement des mains de Ketteler ou des mains de l’évêque d’Hildesheim, et les ouailles de la Réforme, ayant leur pasteur à leur porte, se désintéressaient des sacremens qu’il avait à leur offrir. Les organes du clergé protestant s’épanchaient en lamentations amères, mais inutiles ; ils constataient que, parmi les électeurs appelés à voter pour le renouvellement des conseils presbytéraux, un quart à peine se dérangeaient.

Cet Etat prussien que Bismarck, en 1875 même, affichait comme un Etat évangélique, affaiblissait, chez beaucoup de ses sujets protestans, l’habitude de prendre contact avec leur Eglise dans les grandes circonstances de leur vie ; il favorisait ainsi les progrès de l’indifférence religieuse, et bientôt l’on allait constater, par des statistiques de librairie, que la Bible se lisait moins en Prusse. La conférence évangélique-luthérienne de Berlin se plaignait que les partisans du Culturkampf combattissent contre « tout ce qui est Eglise, » et même contre « les vérités chrétiennes communes aux deux confessions. »

L’esprit qu’apportait Falk dans la gérance de l’établissement