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Et voilà qu’en ses yeux un autre éclair a lui,
Car un son calme, un son très doux monte vers lui :
La flûte chante.

Un pâtre-enfant souffle son âme
Dans le roseau qui fut le cachot de la flamme,
Où se réveille aussi le souvenir du vent
Qui le faisait chanter lorsqu’il était vivant ;
Et, dans cette musique errante avec la brise.
On croit ouïr le bruit charmeur d’une eau qui brise,
Les crépitemens doux qui précèdent un feu.
Et, dans le souffle humain, l’esprit devenant dieu !

A chaque feu nouveau qui naît, grandit, flamboie,
La flûte au loin répond par des éclats de joie ;
Autour des clairs foyers joyeux et réchauffans,
Dansent, en se tenant par la main, les enfans ;
Grave, l’aïeul nourrit le foyer et le garde,
Tandis qu’en souriant un couple, qui regarde,
Respire dans la nuit quelque chose d’heureux,
Et, feux ou chants, tout est sorti du roseau creux.


XI


Et le héros sourit, sous le bec qui le ronge.
Oublieux des carcans qui le chargent, il songe ;
Il lui semble que tous ces feux, astres humains,
Tous les bonheurs naissans, inventés par ses mains.
Et tous les arts futurs qui naîtront de la flamme,
Chants et feux, tout rayonne en lui ; tout est son âme.
Les maux des hommes, tous, furent soufferts par lui :
Tous les bonheurs humains sont les siens aujourd’hui ;
Pan tout entier l’habite, et l’univers sonore
Emplit son cœur joyeux d’harmonie et d’aurore.
Même tout l’avenir resplendit dans son cœur :
Il voit l’homme passer sur le globe, en vainqueur ;
De siècle en siècle il voit monter sa gloire accrue :
L’homme a forgé le fer : l’épée et la charrue ;