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LA HAINE DU PLAISIR
DANS
LE PURITANISME ANGLAIS


I

Stendhal a dit : « Mohammed fut un puritain ; il voulut proscrire les plaisirs qui ne font de mal à personne. » C’est là, en effet, l’idée que l’on se fait en général du puritain : un homme grave et austère, d’une morale sévère et même revêche, s’interdisant tout plaisir, toute gaieté même, si innocente soit-elle, et condamnant tous ceux qui jouissent de la vie ; en un mot, un rigoriste, quand ce n’est pas un hypocrite.

Cependant, à la réflexion, il semble qu’il y ait bien autre chose dans le puritanisme ; il peut même sembler que ce portrait du puritain soit tout extérieur, et ne résulte que d’une observation bien superficielle. Le puritanisme constitue surtout, dira-t-on, un ensemble de croyances religieuses, assez diverses, à la vérité, mais nettement apparentées entre elles. C’est une certaine forme du protestantisme, commune à des sectes nombreuses, et caractérisée par des dogmes théologiques particuliers. L’attitude morale et sociale n’en serait qu’un contrecoup, qu’une conséquence lointaine et secondaire ; l’essentiel du puritanisme serait dans ses doctrines plutôt que dans la morale qui en découle.

Et cependant, à y regarder de plus près, à étudier les pays où domine le puritanisme, c’est-à-dire l’Angleterre, l’Ecosse,