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et les Âmes du Purgatoire, l’année suivante, dans la Revue des Deux Mondes. Bref, en 1834, Mérimée avait produit une grande partie de son œuvre, et, parmi les écrivains de son âge, aucun n’était alors en possession d’une renommée aussi incontestée.

Il n’était d’aucun parti littéraire. Il plaisait aux classiques par la pureté et la sécheresse de son style, par son art sobre et robuste. Planche le louait ici même. Hugo le traitait amicalement. Stendhal lui témoignait la plus vive admiration. Musset, dans des vers qui ne sont point admirables, mettait son nom à côté de celui de Calderon :

L’un, comme Calderon et comme Mérimée,
Incruste un plomb brûlant sur la réalité,
Découpe à son tombeau la silhouette humaine,
En emporte le moule, et jette sur la scène
Le plâtre de la vie avec sa nudité.

(À la lecture de tels vers, quel combat dut s’engager entre la vanité flattée et le goût blessé d’un Mérimée !)

L’ambition ne dominait pas sa vie. Il recherchait d’autres succès que ceux de la littérature et d’autres plaisirs que celui d’écrire. On rencontrait dans tous les salons ce personnage aux allures correctes et glaciales, les traits du visage fortement caractérisés, le regard « furtif et pénétrant, » les lèvres pincées et ironiques, la voix gutturale et sans nuances. Il avait le goût des amitiés féminines autant que celui du libertinage. Il était dandy et anglomane, comme le voulait la mode, et cachait sous un cynisme imperturbable une sensibilité très vive. En ce temps-là, il semblait cependant que ses attitudes de « mauvais sujet » ne fussent point simple affectation. M. Augustin Filon, le mieux renseigné de ses biographes, affirme qu’il est fort difficile de rendre aimable cette période de l’existence de Mérimée : 1830-1834 ; et « que le plus complaisant ou le plus effronté des entrepreneurs de réhabilitations posthumes y échouerait. » Mérimée don-juanisait dans le monde, et ailleurs. On distingue assez bien la figure de l’homme à travers la plainte d’une de ses victimes : « Un de ces jours d’ennui et de désespoir, je rencontrai un homme qui ne doutait de rien, un homme calme et fort, qui ne comprenait rien à ma nature, et qui riait de mes chagrins. La puissance de son esprit me fascina entièrement ; pendant huit jours, je crus qu’il avait le secret du bonheur, qu’il