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La colonie de Fort-Romie (Californie) n’a pas donné des résultats moins remarquables. La première tentative d’y établir dix-huit familles indigentes de San Francisco échoua, et cela comme à Fort-Herrick, faute d’avoir établi, au préalable, un système d’irrigation suffisant. Trois ans après, M. Boolh-Tucker reprit l’affaire ; il conclut un marché pour la fourniture de l’eau avec la Compagnie des eaux de Monterey et, en cas de sécheresse, on s’arrangea pour amener sur le terrain l’eau de la rivière Salinas. En 1904, on y transporta derechef vingt familles pauvres ; et cette fois, l’entreprise réussit. Le prix coûtant du terrain, auquel on ajoute les frais d’installation, est évalué à forfait et remboursable en vingt ans, sans intérêt, le premier terme n’est exigible que la troisième année ; en cas de retard dans le paiement de l’annuité, le colon doit payer à l’Armée du Salut un intérêt de 5 à 6 pour 100.

Tandis que l’entreprise de Fort-Amity a laissé un déficit de 115000 francs, celle de Fort-Romie, mieux conduite, a donné un boni de 30 000 francs. Bien que ces résultats ne soient pas très brillans, ils ont paru assez bons pour provoquer les dons de quelques philanthropes ; ainsi M. Georges Herring a donné à l’Armée du Salut 2 millions et demi de francs, pour acheter de nouveaux terrains de colonisation. Le général Booth a jeté les yeux sur le Canada. Sur sa demande, le ministre sir John Gorst, en novembre 1904, soumit au Parlement anglais un bill intitulé : « Pour la réforme de la loi de 1824 sur le vagabondage et la création des colonies de travail. » Le ministre des Colonies, M. Lyttleton, ordonna l’envoi d’un commissaire pour faire enquête sur la situation agricole et économique des colonies salutistes aux Etats-Unis ; ce fut précisément M. Rider Haggard, qui exécuta son voyage en février-avril 1908. Lord Grey, gouverneur du Canada, et sir W. Laurier, premier ministre, se montraient favorables, mais le commissaire voulut aller trop vite ; il demanda au gouvernement canadien de faire l’avance d’un capital ou, au moins, de garantir l’intérêt d’un emprunt de l’Armée, pour établir la colonie, et il se heurta à un refus. Cet échec interrompit pour un temps les négociations : nous ne doutons pas qu’elles ne soient reprises et ne finissent par aboutir.

La dernière création, — la plus originale, — du général Booth est celle d’un bureau de Secours préventifs contre le suicide ;