Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/665

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Suave et délicat que chaque instant enlève,
Ce rêve de rosée et dont l’enchantement
Renaît dans un si pur et si beau tremblement
Qu’il semble dévider un arc-en-ciel immense.
Me suis-tu ?
 

GLINIS


Je te suis ! Et mon respect commence.

CALLICLÈS


N’est-elle pas la pierre aussi des voluptés ?
Quelle autre a ces désirs, ces éclats exaltés
Qui meurent en langueurs, en pâleurs, en extase ?
Un chaud frissonnement de passion l’embrase,
La suffuse de pourpre et la fait haleter
D’un transport trop intense et lourd à supporter ;
Et ses félicités brûlantes, somptueuses,
S’alanguissent bientôt en des blancheurs laiteuses
Où de pâles azurs, d’inexprimables verts,
Des mauves tels que seuls en ont les hauts éthers
Dans leur chaste froideur prennent sa défaillance.
Son bref, son expirant délice s’y fiance
A la mélancolie attristée. Et sais-tu
Un symbole plus beau du désir éperdu
Qui dans nos cœurs humains se résout en angoisse ?
Mais les Dieux ont voulu qu’un autre désir croisse
Sur les pas de celui qui s’éloigne épuisé ;
L’opale, ranimant son éclat apaisé,
Palpite de nouveau de cette double transe
Faite de lassitude et de magnificence.
Ah ! ceux qui sont épris de l’invincible émoi,
Les amans, peuvent bien la porter à leur doigt,
La pierre de regrets aussi beaux que ses fêtes,
Pierre des voluptés toujours insatisfaites !
…………..