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sociétés de banque et de dépôts, trouvent chez elle les mêmes facilités. C’est avant tout à deux raisons majeures, qu’il est nécessaire de bien mettre en lumière pour expliquer la fortune de l’établissement et la puissance incontestée de son action. Ces deux raisons sont la liberté que lui ont laissée ses statuts au point de vue de l’émission, et l’organisation de sa direction, dans laquelle l’Etat n’intervient que par la nomination du gouverneur, des deux sous-gouverneurs, et la confirmation du choix des directeurs de succursales.

Pendant la plus grande partie de son existence, la Banque a vécu sous un régime qui lui permettait de créer des billets en quantités illimitées. Les statuts primitifs se bornaient à recommander aux régens de veiller toujours à ce que les ressources métalliques fussent telles que le remboursement à vue des engagemens fût assuré. Les statuts fondamentaux du 16 janvier 1808 ne traitent même pas la question. Ils se bornent à dire (article 38) que toute délibération du Conseil général ayant pour objet la création ou rémission de billets doit être approuvée par les censeurs, et que leur refus unanime en suspendrait l’effet. Le législateur impérial, qui ne péchait cependant pas par défaut d’autorité, avait compris qu’en matière commerciale il n’y a pas lieu d’édicter des règles rigides, et que la meilleure garantie du public est la responsabilité des hommes qui sont à la tête d’une affaire. Ceux-ci, mêlés à la vie quotidienne de la nation, tenus sans cesse au courant des besoins du monde financier, avertis à chaque heure de ce qui se passe dans le monde sur les principaux marchés monétaires, sont constamment à même de fixer la mesure dans laquelle il convient d’étendre ou de restreindre la circulation : ils savent ce qu’il est légitime d’accorder aux demandes des négocians désireux de faire escompter leur papier et quelle proportion de numéraire doit être tenue à la disposition des porteurs de billets qui voudraient les échanger contre de l’or. La limitation à un montant déterminé du chiffre total de la circulation est une mesure parasitaire, qui n’a été introduite que par surprise dans la législation relative à la Banque, et dont les meilleurs esprits ont, à diverses reprises, réclamé l’abrogation. Autant il est naturel qu’à des époques exceptionnelles, lorsque le cours forcé est décrété, un maximum soit imposé à la création d’un papier qui cesse d’être remboursable en métal ; autant il est