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Cette dénonciation haineuse eut, en ce qui touche Magon de la Balue des effets immédiats. Il fut décrété d’arrestation le jour même où elle avait été rédigée et remise au Comité de Sûreté générale.

A mentionner encore que c’est Héron qui fit envoyer deux agens à Saint-Malo pour activer les poursuites contre la famille Magon. L’un d’eux, le citoyen Coulongeon qui se décorait du nom de Tape-Dur, avait été déjà son complice dans d’autres opérations. Il est probable qu’après avoir fait arrêter à Saint-Malo Magon de la Blinaye et Magon de la Lande, il ne revint pas les mains vides. Sénart l’accuse formellement d’avoir rapporté un vêtement appartenant à l’un des détenus, dans la doublure duquel étaient cousus des louis d’or et de n’avoir remis cette dépouille au Comité de Sûreté générale qu’après l’avoir allégée en s’en appropriant une partie, que très vraisemblablement il partagea ensuite avec Héron. À cette occasion, comme en plusieurs autres, Héron eut maille à partir avec certains membres des Comités qui lui reprochaient ses indélicatesses. Dénoncé à la Convention, son arrestation fut même demandée. Mais, toujours, il se tira d’affaire grâce à la protection de Robespierre et de Couthon. Celui-ci le défendait en disant que la République lui devait d’avoir découvert les grands conspirateurs, les riches, les banquiers et qu’on ne vit jamais meilleur révolutionnaire. »

Il est un autre fait non moins révélateur. Il existe aux Archives Nationales un procès-verbal de la levée des scellés qui eut lieu, le 7 prairial, chez Magon de la Balue. On lit en marge de ce document, qui servit de base à l’acte d’accusation que dressa Fouquier-Tinville à la veille de la comparution des accusés devant le tribunal révolutionnaire, l’annotation suivante de la main de l’accusateur public ou d’un de ses secrétaires : « Remis par le citoyen Héron. » De plus, tout ce qui est de nature à constituer des griefs et des charges contre les accusés est souligné au crayon rouge dans le procès-verbal et se trouve reproduit dans l’acte d’accusation. Quand on regarde à tous les forfaits dont Héron fut le complice et quand on rapproche ses actes de ce qui fut fait contre les Magon, on est contraint de conclure que, plus que personne, il fut leur dénonciateur, leur persécuteur et leur bourreau.

D’ailleurs, il ne fut pas le seul. Parmi les membres du Comité de Sûreté générale, tel qu’il était composé au moment