LA FILLE DU CIEL.
Ni pitié, ni merci pour le Tartare; que jamais ne s’apaise notre héroïque colère, notre sainte liaine !... Envers tous les autres vi vans, nous connaissons nos devoirs : bienveillance, compassion, charité. Quels que soient les hommes, d’où qu’ils viennent, du Midi, du Nord, de l’Occident avide, à tous ceux qui se diront amis, tendons des mains frater- nelles, selon l’immémoriale tradition que, seuls, nos envahis- seurs ont violée ! Je jure, devant vous, ô Mânes de mes ancêtres, et devant vous, ô mes sujets bien-aimés, je jure de veiller sévèrement sur moi-même, de m’appliquer à ne manquer à aucun de mes devoirs, d’être attentive et anxieuse comme si je portais entre mes mains une coupe trop remplie, dont l’eau ne doit pas être renversée; je jure d’affronter la tête haute les menaces de l’avenir, de subir avec résignation la deslinée cruelle et de ne pas ciller des paupières même devant le glaive levé sur moi! (Elle se rassied sur le trône.) Tous. — Dix mille années ! Dix mille années ! (La musique reprend au fond de la scène. Sur un signe du maître des cérémonies, les mandarins quittent leurs places et viennent se ranger en plusieurs lignes au pied du trône.) Deux hérauts. — Agenouillez-vous! D’autres hérauts, sur les portes, répétant le même ordre à la foule gui est sur les terrasses et dans les cours. — Agenouillez- vous ! (Tous les mandarins s’agenouillent en même temps.) Les hérauts. — Prosternez-vous ! Les hérauts des portes. — Prosternez-vous ! (Tous les mandarins se prosternent par trois fois en approcliant leur front du sol trois fois par chaque prosternement.) Les hérauts. — Relevez-vous! Les hérauts des portes. — Relevez-vous ! fTous les mandarins se relèvent et regagnent leurs places.) Un héraut. — Que le vice-roi du Sud, au nom de tous, réponde à Sa Majesté. (Le maître des cérémonies s’approche de l’Empereur tartare et le guide TOME II. — 19H. 23