Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/651

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

coupait l’allumage, pour descendre en vol plané, qu’à 20 ou 25 mètres de hauteur au plus, son frère Orville, à Potsdam, le 30 octobre, battant tous les records de ce genre, donnait à ses admirateurs le spectacle impressionnant d’un aviateur arrêtant son moteur à 300 mètres d’altitude et atterrissant doucement ensuite comme un oiseau.

En somme, l’année 1909 se montrait digne de son aînée et si, dans l’histoire, malgré le raid inoubliable de L. Blériot, elle semblera toujours un peu pâle à côté de sa cadette, c’est que cette dernière, au quadruple point de vue sportif, militaire, industriel et scientifique, a dépassé tellement les prévisions les plus optimistes, que nos descendans, quoi qu’il advienne, la regarderont sans doute toujours comme l’année par excellence de l’Aviation triomphante.

En France, un formidable mouvement d’opinion, dû à des causes diverses, auquel l’armée adhérait avec ardeur et que M. d’Estournelles de Constant a su diriger et canaliser, a déterminé la création, grâce à des dons généreux, d’une chaire d’aviation à la Sorbonne, de laboratoires de recherches et, enfin, de la toute jeune et déjà célèbre Ecole supérieure d’Aéronautique. Des écoles de pilotes se sont ouvertes un peu partout, les concours se sont multipliés, des fabriques d’aéroplanes ont surgi de toutes parts et nombre de nations étrangères n’ont pas tardé à nous imiter, impatientes de nous égaler et de nous surpasser. Ce que cette création spontanée d’une science, d’un art et d’une industrie nouveaux devait amener, nous allons le voir.

La vitesse propre d’un aéroplane constitue, on le sait, sa caractéristique la plus importante : pas de vitesse, pas de vol ; faible vitesse, équilibre difficile ; grande vitesse, équilibre facile, vol aisé, l’appareil devenant mieux maniable ; un aérobus, c’est-à-dire un aéroplane faisant 150, 200 mètres à la seconde, serait, à un certain point de vue, l’idéal, car tout organe de stabilisation lui serait inutile. Or, tandis qu’en 1908, les vitesses acquises s’étaient maintenues à 16 mètres environ, que, l’année suivante, Curtiss sur son biplan, Blériot et Latham sur leurs monoplans, n’avaient guère dépassé 21 à 22 mètres, c’est à 30 mètres par seconde qu’en 1910, Morane, Leblanc, Graham White, etc., ont fendu l’air sur leurs monoplans. Le 29 octobre de cette année, le jour où se disputait à New-York la coupe