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toujours circonspect M. Quicherat n’a pas osé écrire : intentionnellement, quoique ce mot fût dans sa pensée. Il a peut-être craint qu’on ne s’en servît pour en tirer une conclusion trop rigoureuse.

« Pour le prouver, il est vrai, on objecte une coutume usitée au moyen âge, qui consistait, de la part de celui qui écrivait une lettre, à insérer un de ses cheveux dans la cire encore molle du sceau. Jeanne a-t-elle observé cet usage ? L’a-t-elle fait observer par le clerc qui libellait et scellait ses lettres ? A la rigueur, on peut le présumer, mais non l’affirmer. »

Le sceau a malheureusement disparu, et, depuis cette époque, les mesures les plus sévères ont été prises pour assurer la conservation de cette lettre. La pièce est écrite sur du papier portant un gantelet en filigrane. Elle a été envoyée trois mois après la lettre aux habitans de Reims et porte la signature de la Pucelle. C’est l’époque des sièges de Saint-Pierre-le-Moustier et de la Charité. Mal soutenue par le Roi et par ses conseillers qui ne voulaient que la paix, Jehanne substitue son action personnelle à l’inertie royale. Elle se montre chef de guerre et s’occupe à réclamer tous les approvisionnemens nécessaires. Elle s’adresse à nombre de villes, entre autres à Riom pour en obtenir des secours. Une missive de Charles d’Albret, lieutenant du Roi en Berry, écrite aussi de Moulins le 9 novembre, accompagnait la lettre de Jehanne. A Clermont, les registres du temps attestent que cette ville a également reçu une lettre de « Jehanne la Pucelle et messaige de Dieu » faisant les mêmes demandes.

On remarquera la signature de Jehanne qui est encore d’une main novice, peu exercée. Pour plus de clarté, nous reproduisons ici les fac-similés des trois signatures de la Pucelle, avec leurs dates : le lecteur, en les voyant les unes à côté des autres, comprendra mieux les observations qu’elles suggèrent. Dans