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de copier les lettres que je vais écrire au des de cette page, et de les remettre à leurs destinataires, si du moins cela n’est pas trop de fatigue pour lui. Et je reste à jamais, chère maman, ton fils tendrement dévoué — T. CHATTERTON.

P. S. — J’ai déjà chez moi quelques petits cadeaux pour toi, pour ma sœur, pour Thorne, etc.


L’auteur de cette lettre oublie de dire que, si « M. Walmsley l’a logé dans une de ses meilleures chambres, » — et il faut savoir que ce M. Walmsley est un pauvre plâtrier, habitant le faubourg lointain et mal famé de Shoreditch, — il n’a pu l’y recevoir qu’à la condition de lui faire partager le Ut d’un jeune ouvrier mécanicien. Et nous pouvons être sûrs que l’illustre M. Wilkes, quoi qu’on en ait dit à notre poète, n’a guère trouvé le loisir de s’occuper de ses manuscrits, comme aussi que jamais aucun libraire n’entreprendra de « présenter » l’obscur petit journaliste aux importans et fastueux personnages que sont les aldermen (ou conseillers municipaux) Townshend et Sawbridge, à peine moins inaccessibles au commun que le roi George lui-même. La « science des procédés et artifices des libraires, » que l’enfant se flatte de « posséder à fond, » a pareillement une foule de secrets qu’il ignore, et dont l’ignorance va faire de lui, avant quatre mois, le plus glorieux modèle de ces « grands génies qui peuvent risquer de mourir de faim. » Mais, avec tout cela, comme le spectacle de ce naïf enthousiasme est pour nous rendre chère la figure du « fils tendrement dévoué » de l’excellente Mme Chatterton ! Quelle charmante confiance dans les hommes et dans la vie, quel désir généreux de faire partager son ravissement ! Sans compter qu’il y a, au verso de la même feuille, ces autres « lettres » qu’un ami du poète, son intime confident Thomas Cary, est prié de « copier pour les remettre à leurs destinataires, si cela peut se faire sans trop de fatigue. » Ce sont de courts billets, adressés à diverses personnes de Bristol dont le poète avait conservé un bon souvenir : et tout le cœur du malheureux enfant s’y épanche à nous, par-dessous la vantardise amusante de l’ex-apprenti de province admis à honorer de sa collaboration l’une des innombrables revues de la capitale. Les voici, avec le nom du destinataire en tête de chacune d’elles :


Pour M. T. Cary.

Je t’ai envoyé une corvée qui, je l’espère, ne le déplaira pas. Dis bien à toutes nos connaissances de ne pas manquer désormais à lire le Freeholder’s