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honneur » et Phèdre parle de son honneur de femme. Il n’est pas question de rang là dedans.

Ailleurs M. Masson-Forestier trouvera « vers pâle du pâle Oreste » le vers :


Eh bien ! je meurs content et mon sort est rempli.


Trouver Oreste pâle, et pâle ce vers-là, c’est une opinion bien particulière.

Il y a en appendice un morceau sur la sensibilité qui est extraordinaire à ce point de vue, c’est-à-dire pour ce qui est de ne pas comprendre le sens des mots : « Il y a deux sensibilités bien distinctes, l’une aristocratique et la seule connue au XVIIe siècle, l’autre plus moderne… qui daterait des lettres de Mlle Aïssé… Jusque-là l’égoïsme régnait en maître en littérature comme dans les mœurs… La compassion, la douce sympathie qui essaie de partager les peines des malheureux, l’affection désintéressée, ce besoin altruiste d’un cœur généreux d’apaiser les douleurs, tout cela était évidemment ignoré, puisqu’il n’existait même pas de mot pour l’exprimer. » — Donc, M. Masson-Forestier, non seulement ignore « Monsieur Vincent, » comme on disait au XVIIe siècle ; mais il ignore le mot charité ; car enfin, compassion douce, sympathie qui essaie de partager et de soulager les peines des malheureux, affection désintéressée, besoin altruiste d’un cœur généreux d’apaiser les douleurs, mon Dieu, tout cela s’appelait charité et il existait un mot, et même assez répandu pour l’exprimer. Mais poursuivons.

« Au grand siècle, le sensible, c’était le lettré, l’observateur pénétrant, le coupeur de cheveux en quatre. Et c’est ainsi, dans ce sens, puisque le mot sensible n’en avait pas d’autres, que tous’, Racine en tête, le comprirent. Phèdre dira :


Hippolyte est sensible et ne sent rien pour moi !


Ainsi : « Hippolyte est sensible et ne sent rien pour moi, » cela veut dire : « Hippolyte est coupeur de cheveux en quatre et il n’est pas amoureux de moi ! C’est révoltant ! »

Non, M. Masson-Forestier ne sait pas lire ou plutôt ne peut pas lire, parce qu’il ne lit qu’à travers une idée préconçue qui colore ce qu’il lit d’une teinte inattendue et singulière. Me par-donnera-t-on de donner un petit exemple personnel de ce daltonisme ? Je lis dans le livre de M. Masson-Forestier : « M. Faguet :