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Cette aranéide porte ses œufs dans un sac qui traîne et ballotte à terre. Or, si après lui avoir enlevé sa pilule, on lui jette le sac d’une autre lycose, ou l’ouvrage de l’épeire soyeuse ou une bille de liège, l’objet nouveau est accepté comme le légitime. La besacière ne sait pas même distinguer son bien mélangé à de fausses pilules. Il n’y a chez elle ni choix, ni information ; des balles de papier, de coton, de fil rouge lui conviennent parfaitement. Retirée de son terrier, elle se laisse du reste mourir sans savoir en creuser un nouveau ; recommencer demanderait réflexion, et c’est une aptitude qui lui est étrangère.

M. Fabre a interrogé la larve dans le même sens et elle a fait même réponse. Les chenilles de la Processionnaire du pin marchent en filant, les unes derrière les autres, à se toucher. Sont-elles capables de rompre un circuit fermé qui les maintient sur une voie sans issue, les empêche de progresser vers leur nourriture et de retourner au nid ? Une procession parcourt le bord circulaire d’un grand vase ; le circuit, une fois fermé, est isolé du reste de la colonne, les fils qui font communiquer la corniche avec le sol sont balayés ; car ces fils, filés à l’aller, sont suivis pour le retour, servant alors de guide. Or elles restent sept fois vingt-quatre heures sur la margelle, sans l’abri du nid, regagné normalement chaque nuit ; et elles parcourent ainsi 453 mètres en 153 tours. À la fin cependant, par une chaude journée, le retour au nid finit par s’effectuer. Ainsi affamées et transies, c’était en janvier, elles persistent, parce qu’il leur manque le rudiment de lueur rationnelle qui leur conseillerait d’abandonner le circuit. Et M. Fabre soumet le cas de la processionnaire à l’école qui prétend trouver dans l’animalité l’origine de la raison humaine.

Mêmes résultats avec la chenille du grand paon : superbe papillon de nuit. À l’un des bouts du cocon, les fils libres forment embouchure de souricière permettant la sortie, non la rentrée. Si, pendant le travail de confection du cocon, ce cône terminal, que la larve construit par intermittences, en alternant avec les autres parties, est coupé, même à plusieurs reprises, la partie enlevée n’est pas réparée, le travail continue comme sur le cône intact, et la palissade reste incomplète, malgré le danger qui en résulte pour l’insecte et bien qu’il ait de la soie en quantité surabondante.

Terminons par la larve de la scolie, qui mange si savam-