Par l’importance historique de ses conséquences, par l’intérêt médical de ses symptômes et de son évolution, et surtout par l’abondance et la qualité des documens qu’elle apporte à la critique scientifique du témoignage, la folie de Charles VI fournît à la Médecine de l’Histoire comme à l’Histoire de la Médecine un sujet d’études privilégié.
A l’historien, en effet, la maladie de Charles VI offre ce spectacle dramatique : la France, « frappée au chief, » selon le mot de Froissart, dans la personne de son Roi, affolée, incapable de défendre sa liberté et ses biens, et destinée à subir, après trente années de discorde civile et de guerre étrangère, la tutelle d’un roi d’Angleterre. « Pour entrer dans Paris, a dit Michelet, les Anglais ont pris le chemin de la forêt du Mans. »
Au médecin, la folie de Charles VI permet de suivre et d’étudier, pendant la plus grande partie du règne le plus long de la guerre de Cent Ans, un cas d’aliénation mentale qui, par sa symptomatologie complexe et surtout son évolution intermittente, déconcerta les médecins les plus habiles : « Folie moult estrange et incompréhensible, dit Juvenal des Ursins, et qui fut grande merveille au royaume de France. »
Enfin, un tel sujet, grâce à l’intérêt politique exceptionnel qu’il comporte, assure à la critique du témoignage les ressources d’une documentation particulièrement abondante et féconde. A