Le 26 juillet 1696, six semaines après la mort de Sobieski, arrivent à Varsovie les premières instructions de la Cour de France. Le Roi consentait bien à envoyer un prince de sa maison sur les bords de la Vistule, et même il désignait déjà François-Louis. Mais il voulait d’abord prendre ses précautions, étudier le terrain, savoir au juste par son ambassadeur « quelles seraient les sûretés que pourrait trouver le prince en arrivant dans son royaume, quels ports lui seraient ouverts, etc. » Huit jours après, une lettre de Polignac donnait les plus belles espérances sur le projet formé[1]. Les concurrens de Conti seraient selon lui peu sérieux : l’un des fils de Sobieski, prince débauché et antipopulaire ; peut-être un Allemand qu’on ne nommait pas. Conti « serait infailliblement roi de Pologne, avant que ses rivaux n’eussent le temps de former leur brigue et de traverser son élection. » Encore fallait-il presser l’affaire, le bon succès de l’entreprise dépendant de la célérité de l’exécution. « Si l’on donnait au peuple le temps de se rendre maître de l’élection, son peu de penchant pour les princes étrangers rendrait l’affaire plus difficile. Il fallait apporter un million de francs. » « Je le répéterai cent fois, écrivait Polignac, et jusqu’au dernier jour. Pour les Polonais, les promesses ne suffisent pas… Il faudra tout au moins leur montrer les coffres ou leur donner des arrhes, comme on fait aux ouvriers et aux marchands. » «… Les gentilshommes qui viendront à la diète d’élection demanderont à celui qu’ils éliront d’être remboursés de leurs frais[2]. » Le Roi paraissant assez peu disposé à vider les caisses de la France pour la Pologne, l’abbé de Polignac reviendra dès lors constamment à la charge avec le même refrain. Sa copieuse correspondance de Varsovie pour l’élection du prince de Conti n’occupe pas moins, en minutes, de quatre volumes in-folio, aux archives des Affaires étrangères. Il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre : le Roi répondait rarement sur le chapitre finances. Conti, de son côté, laissait venir les événemens, avec une sceptique insouciance. Il comptait peu sur le succès ; peut-être ne le désirait-il pas. D’ailleurs, la diplomatie n’était pas son affaire. Sur ce champ de bataille, il n’avait plus les mêmes ardeurs.
Polignac, au contraire, était fort pressant. Il ne cessait de