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100 000 francs par an ? Et puis les conditions de la vie ont singulièrement changé depuis soixante ou quatre-vingts ans ; la lutte pour l’existence est devenue plus violente, partout les vainqueurs ont exploité durement leurs succès, et les comédiens n’ont fait que suivre l’exemple. Il ne faut pas non plus se payer de mots : quand on parle d’artistes nababs, on vise une petite élite, une centaine de favoris au plus, sociétaires de la Comédie, cantatrices, étoiles de la danse, des théâtres de genre ; les autres, la grande masse, végètent ou vivent très modestement. Et enfin les noms cités plus haut ne protestent-ils pas contre cette légende d’une déchéance de la valeur comique ? Quelle prétention étrange de vouloir peser dans une balance de précision les talens anciens et les talens contemporains, pour déclarer ceux-ci inférieurs ? Pourquoi, quand il s’agit des comédiens, se faire une arme du passé qu’on connaît mal, contre le présent qu’on connaît bien, qu’on touche en quelque sorte du doigt, et qui mérite, lui aussi, d’être admiré ?


VICTOR DU BLED.